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Le cocher disparut. Herv'e Martel acheva sa toilette, mais soudain son front se plissa : il venait de passer dans la salle `a manger pour prendre son d'ejeuner du matin et consid'erait, navr'e, la pluie tombant au dehors, une pluie abondante, qui transformait les rues en cloaques.
— C’est bien ma veine, grommela-t-il, pour un jour que je n’ai pas de voiture, il fait un temps de chien.
Et Herv'e Martel lancait `a son appartement bien clos, bien confortable, un coup d’oeil de regret. Mais, soudain, une pens'ee lui traversa l’esprit.
Herv'e Martel prit le t'el'ephone, demanda la communication avec son bureau de la place de la Bourse.
— C’est vous, monsieur Albert ?
Le courtier maritime donna ses instructions au fond'e de pouvoirs, s’enquit du courrier. Au fur et `a mesure, son visage se rass'er'enait.
— N’est-ce pas, monsieur Albert, vous ^etes aussi d’avis qu’il est inutile que je passe au bureau, ce matin ? Cela m’arrange parfaitement, d’autant que je suis l'eg`erement enrhum'e. Pour les affaires urgentes, eh bien, faites donc une chose : envoyez-moi M lle H'el`ene, elle prendra mon courrier. Oui, entendu, je l’attends. `A tout `a l’heure.
Herv'e Martel, tr`es satisfait de l’id'ee qu’il venait d’avoir, avait achev'e tranquillement son d'ejeuner. Puis il 'etait all'e s’installer dans son cabinet de travail, pi`ece 'el'egante d'ecor'ee avec un go^ut extr^eme, remplie d’objets d’art, de tableaux de ma^itres, un vrai boudoir. Il est vrai que ce cabinet de travail ne servait gu`ere. Avenue Niel, ce n’'etait pas le courtier-jur'e d’assurances que l’on voyait, mais l’homme du monde, le Parisien riche. Herv'e Martel, d`es qu’il rentrait, `a six heures, quittait la jaquette des visites commerciales aussit^ot remplac'ee par le smoking ou l’habit de l’'el'egant cercleux.
Au bout d’une heure, Baptiste annonca :
— Monsieur, c’est la demoiselle qui est l`a.
— Priez-la donc d’entrer.
Quelques instants apr`es, dans le cabinet du courtier maritime, p'en'etrait une jeune fille `a la mise `a la fois 'el'egante et correcte. Elle retira son manteau, puis, sur l’invitation d’Herv'e Martel, elle s’assit `a une petite table, `a c^ot'e d’un vaste bureau qui disparaissait sous les papiers.
Sans h^ate, elle d'efit un rouleau de papier blanc qu’elle avait apport'e, puis, de la lame d’un 'el'egant petit canif, elle tailla son crayon.
— Vous y ^etes, Mademoiselle H'el`ene ? demanda M. Martel.
— Oui, Monsieur, r'epondit la jeune fille. Vous permettez un instant ?
D’un geste rapide, elle alla au canap'e d’angle o`u elle avait d'epos'e sa fourrure.
— Vous avez froid, Mademoiselle ?
La jeune fille sourit :
— Mais oui, Monsieur, il ne fait pas tr`es chaud chez vous.
Herv'e Martel sonna Baptiste :
— Voyons, comment se fait-il que cette pi`ece soit si mal chauff'ee ? On g`ele, ici.
— Monsieur sait bien que la chemin'ee ne va pas. J’en ai d'ej`a fait l’observation `a monsieur, il y a quelques jours. Monsieur devrait 'ecrire aux g'erants.
— Vous avez raison, fit-il. J’avais oubli'e.
Puis, se tournant vers la dactylographe, cependant que le domestique se retirait :
— Voulez-vous prendre note, Mademoiselle, d’'ecrire aux g'erants : MM. Nalorgne et P'erouzin, rue Saint-Marc. Vous chercherez le num'ero dans le Bottin. Dites-leur que la chemin'ee ne marche pas, qu’ils viennent la v'erifier, que je compte sur eux, d’urgence. C’est not'e, n’est-ce pas ?
— Oui, Monsieur.
— Bien, Mademoiselle. Encore une lettre, au Comptoir National, une lettre que vous recommanderez. Voulez-vous noter ?… « Messieurs, je vous envoie par ce courrier dix titres au porteur, de mille francs, portant les num'eros ci-apr`es… »
Herv'e Martel ouvrit un tiroir, en retira un petit paquet soigneusement ficel'e qu’il posa sur le bureau plac'e le long du mur, tout `a c^ot'e de la petite table o`u travaillait la st'enographe.
— Vous y ferez attention, Mademoiselle, ces papiers ont de la valeur. Lorsque vous aurez pris les num'eros, que vous indiquez dans votre lettre, vous voudrez bien faire exp'edier ces papiers en lettre recommand'ee. Qu’est-ce qu’il y a ?
— C’est Prosper, c’est le cocher de Monsieur, qui vient comme ca pour son certificat, dit Baptiste.
— Qu’il entre.
Le cocher p'en'etra dans la pi`ece en saluant gauchement. M. Herv'e Martel tournait le dos au serviteur et `a la jeune fille. Il 'etait all'e `a un petit secr'etaire, `a l’oppos'e du cabinet, et r'edigeait le certificat demand'e par le cocher.