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21 августа 1868 г.
Замок Пранжен, близ Ниона.
<Глава XXXVII>*
La lettre n'arrivait pas, et cela le tourmentait beaucoup, il m'en parla souvent. Un jour, pendant notre d^iner en pr'esence de deux-trois personnes nous v^imes entrer le facteur dans l'antichambre – il m'apportait un journal. Orsini lui fit demander s'il n'y avait pas de lettre pour lui – on lui apporta une; il jeta un coup d'oeil rapide et indiff'erent sur le contenu, hocha la t^ete – et continua la conversation. Lorsque nous rest^ames seuls, Orsini me prit la main. «Ah, – dit-il, – je respire enfin, j'ai recu la r'eponse… tout va bien!» Moi, qui savait quel prix il attachait `a la lettre… j'ai 'et'e tromp'e par son apparence. Un tel homme 'etait n'e pour ^etre conspirateur – aussi le fut-il toute sa vie.
…Et que fit-il avec son 'energie?
Et que fit Garibaldi avec son courage, Mazzini avec sa persistance, Pianori avec son revolver, Pisacane avec son drapeau… et les autres martyrs dont le sang n'est pas encore effac'e.' Qu'ont-ils fait?
«Divina Commedia» – ou plut^ot «Commedia» tout simplement dans le sens employ'e par le pape Ghiaramonti dans son entrevue avec l'autre Napol'eon `a Fontainebleau…
Passons maintenant encore une fois `a notre brave B"urger Struve – dictateur-proph`ete, Cromwell et Jean de Leyde du Grand Duch'e de Bade – et ses coll`egues.
Mais avant d'en parler je d'esire ajouter encore quelques consid'erations g'en'erales sur les Umw"alzunge M"anner allemands [420] .
Il faut admettre en th`ese g'en'erale que les Allemands r'efugi'es 'etaient scientifiquement mieux d'evelopp'es – que les r'efugi'es des autres peuples – mais cela ne leur profitait pas beaucoup.
Leur langue sentait l’«aulx» acad'emique et les premi`eres trag'edies de Schiller, ils avaient une gaucherie remarquable dans tout ce qui 'etait pratique et un patriotisme irritable, tr`es chauvin `a sa mani`ere et navigant sous le drapeau du cosmopolitisme.
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Пропуск в рукописи. – Ред.
Apr`es les soul`evements des paysans et la guerre de trente ans – les Allemands ne peuvent se remettre – et le sentent [421] . Napol'eon a fait tout son possible pour les r'eveiller – cela n'a pas r'eussi – il n'avait pas eu encore le temps de traverser l'Oc'ean, que les vieux magn'etiseurs – les rois, les professeurs, les th'eologues, les id'ealistes et les po`etes endormaient d'ej`a toute l'Allemagne.
Les Allemands 'etudient tr`es <…> [422] les classes, ils ont toujours des «<…> [423] comme la vie est courte et la science <est lon> gue [424] ; – ils meurent avant de terminer leurs 'etudes. La vie r'eelle de l'Allemand est dans la th'eorie, la vie pratique n'est qu'un attribut, une reliure pour tenir les feuilles – et c'est l`a qu'il faut chercher la cause de ce que les Allemands les plus radicaux dans leurs 'ecrits – restent tr`es souvent «philistins» dans leur vie priv'ee. A force de s'affranchir d'e tout – ils s'affranchissent des cons'equences pratiques de l'application de leurs doctrines. L'esprit germanique saisit dans les r'evolutions – comme dans tou – l'id'ee g'en'erale et cela dans son sens absolu – sans jamais aller `a la r'ealisation.
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Ecrit en 1855 – 56.
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Угол листа оторван. – Ред.
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Угол листа оторван. – Ред.
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Угол листа оторван. – Ред.
Les Anglais, les Francais ont des pr'ejug'es que l'Allemand a rarement – et ils sont de bonne foi cons'equents et simples. S'ils se soumettent `a des vieilleries qui ont perdu le sens commun – c'est qu'ils les reconnaissent comme vraies et immuables. L'Allemand ne reconna^it rien, except'e la raison – et se soumet `a tout – c'est `a dire il se sert selon les circonstances des pr'ejug'es vulgaires.
Il est tr`es habitu'e `a un petit comfort, «an Wohlbehagen» – et lorsqu'il passe de son cabinet d''etude dans son salon, dans le Prunkzimmer ou dans la chambre `a coucher, il sacrifie sa libre pens'ee – `a l'ordre et `a la cuisine. L'Allemand au fond est tr`es sybarite, on ne le remarque pas parce que ses moyens modiques et sa vie sans bruit ne font pas d'effet – mais un Esquimau qui sacrifierait tout pour avoir de l'huile de morue `a volont'e est aussi 'epicurien que Lucullus. De plus, l'Allemand lymphatique s'appesantit vite et prend mille racines dans un genre de vie donn'ee. Tout ce qui peut alt'erer ses coutumes – l'effarouche et le met hors de lui.
Les r'efugi'es allemands 'etaient de grands cosmopolites – «den Standpunkt der Nationalit"at haben sie "uberwunden». Ils sont pr^ets `a accepter la r'epublique universelle, `a effacer les fronti`eres entre les Etats – pourvu que Trieste et Dantzig restent `a l'Allemagne unie. Les 'etudiants de Vienne ont form'e une l'egion – lors de l'invasion de la Lombardie par Radetzki – conduits par un brave professeur, ils prirent un canon – et le donn`erent en souvenir `a la bonne ville d'Innsbruck.
Avec ce patriotisme chatouilleux et un peu accapariste l'Allemagne regarde avec souci – `a droite et `a gauche. D'un c^ot'e il lui semble toujours que la France traverse le Rhin. De l'autre – que la Russie passe le Ni'emen – et un peuple de vingt – cinq millions se sent orphelin sans protection entre ces deux brigands de grandes routes. Pour se consoler en attendant l'invasion l'Allemand d'emontre «ex fontibus» que la France latine – n'est plus et que la Russie byzantine n'est pas encore.
Les paisibles professeurs, docteurs, th'eologues, pharmaciens et philologues – qui se rassemblaient dans l''eglise de Saint Paul `a Francfort – apr`es 48 – applaudissaient aux Autrichiens en Italie et ne voulaient entendre les plaintes des Polonais de la Posnanie comme entach'ees de nationalisme prussien. Le parlement allemand 'etait tr`es belliqueux – r^evait `a une flotte allemande et jetait d'ej`a ses yeux sur Schleswig-Holstein – «stammverwandt»…
La r'evolution de 48 avait partout quelque chose de pr'ecipit'e, d'inachev'e, de nonsoutenu – mais elle n'avait ni en France, ni en Italie rien de si dr^ole – comme en Allemagne.