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L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Аллен Марсель

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Mais bien vite, Juve s’'etait ressaisi. Bien vite, il en 'etait venu `a penser qu’assur'ement T^ete-de-Lard 'etait un personnage qu’il importait de « cuisiner ».

Juve, en confiant le rescap'e aux bons soins des agents plongeurs, avait invit'e T^ete-de-Lard `a venir le voir et quoique, apr`es r'eflexion, l’inspecteur de la S^uret'e avait 'et'e persuad'e que l’apache manquerait au rendez-vous. Mais non ! T^ete-de-Lard qui sans doute avait une id'ee derri`ere la t^ete pour agir ainsi, 'etait venu sonner au domicile de Juve le soir m^eme.

Le policier l’avait accueilli avec son plus aimable sourire.

— T^ete-de-Lard, avait dit Juve, je tombe de sommeil. Si nous remettions toute causerie `a demain matin, qu’en dites-vous ? J’ai pr'ecis'ement un lit de sangle inoccup'e. Je vous l’offre. Dormez chez moi, nous causerons demain.

Et, sans laisser le temps `a T^ete-de-Lard de r'efl'echir, Juve avait pouss'e l’apache dans le cabinet noir d’o`u Jean venait de le faire sortir.

Juve, toutefois, la veille au soir, avait pris une pr'ecaution nullement superflue.

`A peine T^ete-de-Lard 'etait-il entr'e dans l’alc^ove obscure o`u Juve pr'etendait lui faire passer la nuit que le policier, d’un tour de main discret, avait pouss'e le verrou et boucl'e son h^ote.

— Dors, mon bonhomme, avait alors murmur'e Juve, dors en paix, nous verrons plus tard, demain dans l’apr`es-midi sans doute, `a tirer de toi ce qu’il convient d’en tirer.

Or, depuis ce moment, c’est-`a-dire depuis la veille, Juve n’avait pas revu l’apache.

Celui-ci bien entendu s’'etait r'eveill'e, avait essay'e de sortir de sa prison, puis, 'etait demeur'e immobile, retenant son souffle et faisant les pires suppositions.

— Je suis fait ! se r'ep'etait T^ete-de-Lard. Je suis tout ce qu’il y a de plus fait.

Juve, `a vrai dire aurait certainement interrog'e T^ete-de-Lard dans la matin'ee si, dans les couloirs de la S^uret'e, il n’avait fait la rencontre de M. Ch^atel-G'erard. Les 'ev'enements s’'etaient alors pr'ecipit'es. Il venait tout juste de rentrer lorsqu’il fit demander l’apache.

Juve `a l’apparition de T^ete-de-Lard prit un air des plus aimables :

— Alors mon vieux, commenca-t-il famili`erement, la nuit a 'et'e bonne ? Pas de cauchemars ? Vous ne vous ^etes pas trop emb^et'e ?

— Mais, monsieur Juve, faisait-il, tournant machinalement entre ses doigts sa casquette crasseuse, et pleurant de ses deux yeux 'eternellement noy'es dans la graisse de sa figure, je ne sais pas ce que cela veut dire. Oui, j’ai bien dormi, seulement…

— Et comme ca, interrompait Juve, vous avez 'et'e faire un tour cet apr`es-midi ?

— Un tour, monsieur Juve ?

La face de T^ete-de-Lard continuait `a exprimer un ahurissement quasi complet.

Ah c`a, Juve se moquait-il de lui ?

Il lui demandait s’il avait 'et'e faire un tour, alors que tout juste, il venait d’^etre rendu `a la libert'e ?

— Je n’ai pas 'et'e faire un tour, r'epondait T^ete-de-Lard avec un soupir, puisque vous m’aviez boucl'e.

Mais, `a ce mot, Juve donnait des signes de stup'efaction :

— Boucl'e, mon vieux ? Qu’est-ce que vous voulez dire ?

— J’'etais enferm'e dans le cabinet noir, monsieur Juve.

— Enferm'e ? Qu’est-ce que vous me chantez, T^ete-de-Lard ?

— Dame ! monsieur Juve, protestait-il encore, quand j’ai voulu me lever, ce matin, je me suis apercu que la porte 'etait verrouill'ee.

Or, `a cet instant, Juve 'eclata de rire :

— C’est pourtant vrai. Je me rappelle que ce matin, quand je suis sorti, j’ai machinalement tir'e le verrou oubliant que vous 'etiez l`a. C’est rigolo. Mais vous ne m’en voulez pas hein, T^ete-de-Lard ? Bougre, vous avez d^u croire que je vous avais flanqu'e en taule. Mais, ca ne fait rien. Mettez votre main dans la mienne, T^ete-de-Lard. Entre copains comme nous, il n’y a pas de rancune qui tienne. Nous allons nous caler les joues d’une mani`ere un peu soign'ee, et, si vous m’en croyez, devant une bonne bouteille de vin.

Juve secouait avec une grande amiti'e la main molle et moite que lui abandonnait T^ete-de-Lard. Il poussa l’apache dans la direction de la salle `a manger d’une petite tape amicale sur l’'epaule.

— Venez bouffer, T^ete-de-Lard. Venez, mon vieux !

T^ete-de-Lard commencait `a se rass'er'ener. La cordialit'e de Juve 'etait si parfaite, qu’il e^ut fallu `a T^ete-de-Lard beaucoup plus d’intelligence qu’il n’en avait r'eellement pour comprendre que le policier se moquait de lui.

D’ailleurs, T^ete-de-Lard 'etait gourmand ; ce gros homme qui avait pass'e dix ans de sa vie `a respirer l’odeur fade et chaude du boudin et de la saucisse, appr'eciait les bons soupers, les copieux gueuletons qui entretenaient son embonpoint. Or, Juve le conduisait dans sa salle `a manger o`u un p^at'e croustillant flanqu'e d’un poulet entour'e d’un r'egiment de bouteilles meublait de la plus agr'eable facon la table servie. Comment ^etre morose ou inquiet en pr'esence d’un pareil festin ?

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