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Том 7. О развитии революционных идей в России
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Герцен Александр Иванович

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Le r`egne de Romanoff, avant Pierre Ier, fut la fleuraison du regime pseudo-byzantin; le peuple 'etait comme mort, ou ne donnait des signes de vie qu'en formant des bandes de brigands qui parcouraient les rives la Samara et la Volga. Les rouages lourds d’une administration mal entendue 'ecrasaient le peuple; te gouvernement entrevoyait son incapacit'e, faisait venir des 'etrangers, ne pouvait se tirer d'affaires sans l'exemple de l'Europe, et, par une absurde contradiction, il continuait pourtant `a se renfermer dans une nationalit'e exclusive et professait une haine sauvage pour toute innovation.

Il faut lire les r'ecits des moeurs moscovites de ce temps, faits par un diplomate russe, qui s'est r'efugi'e, vers la fin du XVIIe si`ecle, `a Stockholm, Kochikhine. On recule avec horreur devant l'asphyxie sociale de ce temps, devant ces moeurs qui n''etaient qu'une parodie de mauvais go^ut du Bas-Empire. Les d^iners, les processions, les v^epres, les messes, les r'eceptions d'ambassadeurs, les changements de costumes trois ou quatre fois par jour, formaient toute l'occupation des tzars. Autour d'eux se rangeait une oligarchie sans dignit'e, sans culture. Ces fiers aristocrates, vaniteux des fonctions qu'avaient occup'ees leurs p`eres, 'etaient fustig'es dans les 'ecuries du tzar, m^eme knout'es sur la place publique, sans en ressentir l'offense. Il n'y avait rien l'humain dans cette soci'et'e ignorante, stupide et apathique. Il fallait n'ecessairement sortir de cet 'etat, ou pourrir avant d'avoir 'et'e m^ur.

Mais comment en sortir, d'o`u attendre le salut? Certes, il ne pouvait venir du clerg'e, qui 'etait alors `a l'apog'ee de sa grandeur et de son influence. Le peuple courbait la t^ete et se tenait `a l''ecart; 'etaient-ce donc ces boyards flagell'es qui pouvaient lui indiquer le chemin? Evidemment non, mais lorsqu'une exigence азе fait sentir, les moyens pour la r'ealiser ne manquent jamais.

La r'evolution qui devait sauver la Russie sortit du sein m^eme de la famille, jusque-l`a apathique, des Romanoff.

Avant d'aller plus loin, il nous faut aborder une des questions "ies plus embrouill'ees de l'histoire russe: le d'eveloppement du serrage. Aucune histoire, ni ancienne ni moderne, ne nous pr'esente rien d'analogue `a ce qui s'est produit en Russie, au XVIIe si`ecle, et `a ce qui s'est 'etabli d'efinitivement "au XVIIIe, par rapport aux paysans. Par une s'erie de simples mesures de police, par les empi'etements des seigneurs qui poss'edaient des terres habit'ees, par la tol'erance du gouvernement et par l'inertie des paysans, ceux-ci devinrent, de libres qu'ils 'etaient, de plus en plus fermes `a la terre (krepki), propri'et'es ins'eparables du sol. Il semble que toutes les libert'es de l''etat naturel que les Slaves avaient conserv'ees devaient passer par le terrible creuset de l'absolutisme et de l'arbitraire, pour ^etre reconquises par des souffrances et des r'evolutions.

La commune rurale 'etait rest'ee intacte, pendant que les tzargi minaient les franchises des villes et des campagnes. Son tour vint mais ce ne fut point la commune, ce fut le paysan qu'on 'ecrasa. Nous rencontrons au commencement du XVIIe si`ecle une loi du tzar Godounoff qui r`egle et limite les droits du paysan de passer des terres d'un seigneur sur les terres d'un autre. Cette-loi ne mettait m^eme pas en doute les droits de migration, encore; moins la libert'e individuelle des paysans; elle ne fut motiv'ee que par des raisons 'economiques assez plausibles au point de vue gouvernemental. Les paysans abandonnaient les terres des pauvres propri'etaires et affluaient sur les terres des seigneurs riches; les contr'ees fertiles 'etaient encombr'ees, tandis que les-terrains st'eriles manquaient de bras. Le tzar Godounoff, usurpateur adroit et d'etest'e des grands seigneurs, flattait en outre par cette loi les petits propri'etaires. Tel a 'et'e le premier pas vers le servage.

Bient^ot, le m^eme prince fit une autre loi `a peine concevable; pour la rendre intelligible, il faut dire qu'anciennement le nombre-des serfs en Russie 'etait tr`es restreint: c''etaient ou des prisonniers de guerre ou des esclaves achet'es en pays 'etrangers (kholopi), ou enfin des hommes qui se vendaient eux-m^emes avec leurs descendants (kabalny ludi). Ces gens n'avaient rien de commun ni avec le paysan, ressortissant de la commune et cultivant la terre-seigneuriale, ni avec les serviteurs libres des boyards. Ces derniers 'etaient souvent renvoy'es en grand nombre par les ma^itres et allaient se r'epandre en mendiants ou voleurs de grande route, ou bien, joignaient les brigands de la Volga et les Cosaques du Don, ces receleurs de tous les vagabonds et de tous les gens en guerre avec la soci'et'e. Boris, toujours en garde, craignait cette masse m'econtente et affam'ee; pour mettre fin `a ces inconv'enients, et pour ^etre s^ur que ces hommes fussent nourris pendant la famine et ne se dispersassent pas, il d'ecr'eta que les domestiques qui reseraient un temps donn'e chez leurs ma^itres, seraient leurs serfs-t ne pourraient ni les quitter, ni ^etre renvoy'es. C'est ainsi que des milliers d'hommes tomb`erent dans l'esclavage presque sans s'en apercevoir. Les d'esertions et les fuites ne diminu`erent pas; il serait difficile de pr'eciser combien de soldats cette loi procura aux bandes de D'em'etrius, de Gohsefski, de Jolkefski, du hetman des Zaporogues et de tous les condottieri qui d'evastaient la Russie au commencement du XVIIe si`ecle. Depuis le r`egne de Boris jusqu'`a Catherine II, un mouvement sourd et sombre agita Je peuple des campagnes, et la r'evolte de Pougatcheff est aujourd'hui encore vivante dans sa m'emoire.

Chaque seigneur r'ep'eta en petit le r^ole du grand prince de Moscou, et, de m^eme que les villes avaient perdu leurs libert'es parce qu'elles restaient dans le vague des usages, la commune dans sa lutte avec le seigneur eut le dessous contre le principe de l'autorit'e et de l'individualisme, plus 'energique et plus 'ego"iste qu'elle. Le tzarisme, bas'e lui-m^eme sur un pouvoir illimit'e, devait n'ecessairement prot'eger les attentats des seigneurs, en an'eantissant les d'efenseurs naturels des paysans, les jur'es, en soutenant le seigneur dans toutes ses contestations avec le paysan.Cependant la loi ne pr'ecisait et ne sanctionnait rien, il n'y avait qu'abus de la part du gouvernement et passivit'e de la part du peuple.

Ce fut dans cet 'etat de choses que le premier recensement ordonn'e par Pierre Ier, en 1710, fournit un terrain l'egal `a ces abus monstrueux, et ce fut lui, le civilisateur de la Russie, qui les sanctionna. Il serait difficile de d'eterminer les raisons qui le firent agir de la sorte. Fut-ce une faute, une rancune ou bien un fait providentiel? Ainsi que Pierre Ier fut le repr'esentant du tzarisme et de la r'evolution, de m^eme le seigneur devint le repr'esentant d'un pouvoir inique en m^eme temps que le v'eritable levain r'evolutionnaire. Pierre Ier a entra^in'e l'Etat dans le mouvement, et le seigneur entra^inera directement ou indirectement la commune indolente et passive dans la r'evolution. Ce ferment sera dissous, sans nul doute, mais ce ne sera qu'apr`es avoir consomm'e la perte de l'absolutisme. La commune, ce produit du sol, assoupit l'homme, absorbe son ind'ependance, elle ne peut ni s'abriter du despotisme, ni 'emanciper ses membres; pour se conserver, elle doit subir une r'evolution.

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