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L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Аллен Марсель

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Cependant, Rose Coutureau descendait de sa loge o`u elle venait de se changer pour la troisi`eme fois. La jeune artiste, au cours du spectacle, interpr'etait plusieurs r^oles. L`a, elle revenait dans le costume qui lui plaisait le mieux : il n’avait pourtant rien de bien sensationnel, ce costume. Rose ne portait pas de perruque poudr'ee, de robe `a paniers, de petits souliers de satin comme elle faisait au d'ebut de la pi`ece. Elle 'etait au contraire, simplement v^etue d’une jupe sombre et d’une chemisette de grosse toile. Ses cheveux 'etaient h^ativement nou'es et c’'etaient ses cheveux r'eels, non point la perruque classique ; elle portait sur la t^ete un petit bonnet blanc, mais elle 'etait heureuse et fi`ere de cette simplicit'e m^eme. D'esormais, en effet, elle allait avoir un r^ole sensationnel, tragique, terrible, poignant. C’'etait elle, en effet, qui faisait la souveraine. Le dernier tableau du spectacle repr'esentait l’'echafaud, l’ex'ecution par le bourreau Sanson de Marie-Antoinette, ex-reine de France.

Tel 'etait le second clou de la pi`ece sensationnelle que repr'esentait le Th'e^atre Ornano.

Rose Coutureau 'etait descendue et, devisant sans cesse avec Beaum^ome, elle attendait le moment de para^itre en sc`ene. Il ne restait plus qu’un tableau avant celui de l’'echafaud, c’'etait le Tribunal r'evolutionnaire, au cours duquel la femme Capet allait avoir `a r'epondre des accusations port'ees contre elle. Rose Coutureau, d’ordinaire, aimait beaucoup cette sc`ene, o`u elle 'etait fr'equemment applaudie comme artiste, cependant que la foule houleuse huait le personnage qu’elle interpr'etait. Toutefois, ce soir-l`a, elle 'etait bien trop pr'eoccup'ee, bien trop 'emue pour pr^eter attention `a son art.

Ses soucis personnels retenaient tout son esprit et Rose Coutureau 'eprouvait de plus en plus une angoisse secr`ete. Elle se sentait environn'ee de dangers, de myst`ere, et bien que Beaum^ome, qui commencait `a ^etre alarm'e lui aussi par l’attitude angoiss'ee de sa ma^itresse, f^it l’impossible pour la rassurer, elle avait peur, tr`es peur, peur de rien, peur de tout, peur de l’inconnu, de l’avenir, du pr'esent.

— Je ne sais pas ce que j’ai, disait la jeune fille, mais il me semble qu’il va m’arriver quelque chose d’effroyable. J’ai peur…

— Mais de quoi, voyons ? disait Beaum^ome. T’as rien `a craindre.

Et, pour faire diversion, le jeune apache, qui semblait beaucoup aimer sa nouvelle ma^itresse, essayait de plaisanter :

— C’est pas parce que tu vas ^etre zigouill'ee au dernier tableau dans le r^ole de Marie-Antoinette, que t’as besoin d’avoir la trouille. C’est du carton. La « veuve » est pas m'echante, quoi. T’as d'ej`a eu affaire `a elle tous ces derniers soirs. Elle t’a pas fait de bobo.

Rose Coutureau sourit gentiment `a son amant ; 'evidemment la jeune artiste ne pensait pas m^eme au r^ole tragique qu’elle interpr'etait et les plaisanteries de Beaum^ome 'etaient tout `a fait indiff'erentes `a la reine Marie-Antoinette de la pi`ece. Elle n’y r'epondit m^eme pas et se contenta de murmurer `a l’oreille de son amant :

— C’est curieux, je trouve que ce type qui est venu juste pour remplacer Dick a un dr^ole d’air, il a des yeux effrayants. Cet esp`ece de Talma ne me revient pas du tout. Il a une t^ete qui me fait peur.

La guillotine 'etait dress'ee au premier plan, et si l’on avait attendu quelques instants de plus qu’`a l’ordinaire pour monter le d'ecor, c’est parce que le vieil acteur qui remplacait Dick avait voulu s’assurer lui-m^eme des dispositions du « praticable » et de la mise en sc`ene.

Il avait pass'e quelques instants seul sur le plateau `a c^ot'e de la hideuse machine, merveilleusement reconstitu'ee d’apr`es les documents exacts de l’'epoque.

L’ex'ecution faite devant le public 'etait simul'ee avec un art parfait. L’artiste qui jouait le r^ole de Marie-Antoinette devait en effet se laisser basculer sur la planche sinistre et se prendre le cou dans la lunette. Un 'eclair brillait alors au sommet de l’'echafaud et on laissait tomber un cartonnage qui figurait le couperet fatal.

Le r^ole du bourreau alors, ou pour mieux dire de l’acteur qui jouait Sanson, consistait `a s’interposer entre le public et la guillotine afin de dissimuler par son corps celui de la victime. Il prenait d’ailleurs dans un panier une t^ete de carton et la levait au bout du bras pour montrer au peuple que justice 'etait faite. Et c’est `a ce moment que le rideau tombait.

On avait expliqu'e `a Talma le jeu de sc`ene de ce tableau et lui-m^eme avait 'et'e v'erifier l’'echafaud.

Fant^omas le bourreau, 'etait all'e changer de costume. Au moment o`u on levait le rideau, il se dissimula derri`ere un portant attendant son entr'ee.

Les appr^ets du supplice, l’arriv'ee sur la sc`ene de la charrette amenant la veuve Capet, prenaient environ dix bonnes minutes et le bourreau n’apparaissait pas tout de suite, il ne devait surgir de derri`ere le « praticable » qu’au moment o`u la reine s’approchait.

Comme toujours, l’apparition de la guillotine, plac'ee en plein milieu de la sc`ene, provoqua des murmures divers dans la salle v'eritablement empoign'ee par l’int'er^et du spectacle.

C’est qu’il y avait l`a nombre de gens pour qui la vue de la sinistre machine 'etait comme une indication, comme une menace. Savait-on jamais si quelque aventure f^acheuse ne vous am`enerait pas un jour `a subir pour de bon le supplice que l’on allait applaudir au th'e^atre ?

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