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Том 7. О развитии революционных идей в России
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Герцен Александр Иванович

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Tchatski, le h'eros d'une com'edie c'el`ebre de Gribo"i'edoff, est un On'eguine raisonneur, son fr`ere a^in'e.

Le H'eros de nos jours, par Lermontoff, est son fr`ere cadet. M^eme dans, les productions secondaires, On'eguine repara^it, outr'e ou incomplet, mais reconnaissable. Si ce n'est lui, c'est au moins sa copie. Le jeune voyageur, dans le Tarantass du cte Sollogoub, est un On'eguine born'e et mal 'elev'e. Le fait est que tous, nous sommes plus ou moins On'eguine, `a moins que nous n'aimions mieux ^etre tchinovnik (employ'e) ou pomechtchik (propri'etaire).

La civilisation nous perd, nous d'esoriente, c'est elle qui fait que nous sommes `a charge aux autres et `a nous-m^emes, d'esoeuvr'es, inutiles, capricieux; que nous passons de l'excentricit'e `a la d'ebauche, d'epensant sans regret notre fortune, notre coeur, notre jeunesse, et cherchant des occupations, des sensations, des distractions, comme ces chiens d'Aix-la-Chapelle de Heine qui demandent aux passants, comme une gr^ace, un coup de pied pour les d'esennuyer. Nous faisons tout, de la musique, de la philosophie, de l'amour, de l'art militaire, du mysticisme, pour nous distraire, pour oublier le vide immense qui nous opprime.

Civilisation et esclavage, sans m^eme qu'il y ait «un chiffon» entre les deux, pour emp^echer que nous ne soyons pas broy'es int'erieurement ou ext'erieurement entre ces deux extr^emes forc'ement rapproch'es!

On nous donne une 'education large, on nous inocule les d'esirs, les tendances, les souffrances du monde contemporain, et l'on nous crie: «Restez esclaves, muets, passifs, ou vous ^etes perdus». En r'ecompense, on nous laisse le droit d''ecorcher le paysan et de dissiper sur le tapis vert ou au cabaret l'imp^ot de sang et de larmes que nous pr'elevons sur lui.

Le jeune homme ne rencontre aucun int'er^et vivace dans ce monde de servilisme et d’ambition mesquine. Et pourtant, c’est dans cette soci'et'e, qu’il est condamne `a vivre, car le peuple encore plus 'elogn'e de iui. «Ce monde» est au moins compos'e d’'etres d'echus de la m^eme esp'ece, tandit qu’il n’y a rien de commun entre lui et le peuple. Les traditions ont 'et'e si bien rompues par Pierre Ier qu'il n'y a pas de force humaine capable de les r'eunir, au moins quant `a pr'esent. Il nous reste l'isolement ou la lutte et nous n'avons pas assez de force morale ni pour le premier ni pour la seconde. C'est ainsi qu'on se fait On'eguine, si l'on ne p'erit pas dans les maisons publiques ou dans les casemates d'une forteresse.

Nous avons vol'e la civilisation, et Jupiter veut nous punir avec le m^eme acharnement qu'il a mis `a tourmenter Prom'eth'ee.

A c^ot'e d'On'eguine, Pouchkine a plac'e Vladimir L'enski, autre victime de la vie russe, le vice-versa d'On'eguine. C'est la souffrance aigu"e, `a c^ot'e de la souffrance chronique. C'est une de ces natures virginales, pures, qui ne peuvent s'acclimater dans un milieu corrompu et fou, qui ont accept'e la vie, mais ne peuvent rien accepter de plus du sol immonde, si ce n'est la mort. Victimes expiatoires, ces adolescents passent jeunes, p^ales, marqu'es au front par la fatalit'e, comme un reproehe, comme un remords et laissent encore plus noire la nuit triste dans laquelle «nous nous mouvons et sommes».

Pouchkine a trac'e le caract`ere de L'enski avec cette tendresse, qu'on a pour les r^eves de sa jeunesse, pour les r'eminiscences de ce temps o`u l'on a 'et'e si plein d'esp'erance, de puret'e, d'ignorance. L'enski est le dernier cri de conscience d'On'eguine, car c'est lui-oi^enie, c'est son id'eal de jeunesse. Le po`ete a vu qu'un tel homme l'avait rien `a faire en Russie, il l'a tu'e da la main d'On'eguine, d'On'eguine qui l'aimait et qui, en le visant, ne voulait pas le blesser. Pouchkine s'est effray'e lui-m^eme de cette fin tragique, il se presse de consoler le lecteur, en lui tracant la vie banale qui attendait le jeune po`ete.

A c^ot'e de Pouchkine se place aussi un L'enski – ce fut V'en'evitinoff, ^ame candide et po'etique 'ecras'ee par les mains grossieres de la vie russe, `a vingt-deux ans.

Entre ces deux types, entre l'enthousiaste d'evou'e, entre le po`ete, et de l'autre c^ot'e, l'homme fatigu'e, aigri, inutile; entre la tombe de L'enski et l'ennui d'On'eguine, se tra^ine le fleuve profond et bourbeux de la Russie civilis'ee, avec ses aristocrates, bureaucrates, officiers, gendarmes, grands-ducs et empereur, masse informe et muette de bassesse, de servilisme, de l'erocit'e et d'envie, qui entra^ine et engloutit tout, «ce goultre, comme dit Pouchkine, o`u, cher lecteur, nous nous baignons avec vous».

Pouchkine a d'ebut'e par des po'esies r'evolutionnaires d'une grande beaut'e. Alexandre l'a exil'e de P'etersbourg sur les confins m'eridionaux de l'empire; nouvel Ovide, il passa l''epoque de sa vie de 1819 `a 1825 dans la Chersonese taurique. S'epar'e de ses amis, loin du mouvement politique, au centre d'une nature magnifique mais sauvage, Pouchkine, po`ete avant tout, se concentra dans son lyrisme; ses pi`eces lyriques sont les phases de sa vie, la biographie de son ^ame; on y trouve les vestiges de tout ce qui 'emouvait cette ^ame de feu, la v'erit'e et l'erreur, l'entra^inement passager d'un moment et les sympathies profondes et 'eternelles. Nicolas rappela Pouchkine de l'exil quelques jours apr`es avoir fait pendre les h'eros du 14 d'ecembre. Il voulut le perdre dans l'opinion publique par sa gr^ace, le r'eduire par ses bont'es.

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