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Том 7. О развитии революционных идей в России
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Герцен Александр Иванович

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Nous ne citons ces paroles que pour montrer encore une fois tournure de l'esprit russe. D`es qu'on avait commenc'e `a pr^echer l'absurdit'e du dualisme, le premier homme de talent en Russie qui s'occup^at de la philosophie allemande s'apercut qu'elle n''etait r'ealiste que sur parole, qu'elle restait au fond une religion terrestre, une religion sans ciel, un couvent logique o`u on fuyait le monde pour se plonger dans les abstractions.

L'activit'e publique de B'elinnski ne date que de 1841. Il s'empara alors de la direction des Annales patriotiquesde Petersburg et domina le journalisme pendant six ann'ees. Il tomba,comme un guerrier, avec le journalisme russe. Il est mort en 1848, ext'enu'e de fatigue, abreuv'e de d'ego^uts et en proie `a la plus grande mis`ere.

B'elinnski a beaucoup fait pour la propagande. Toute la jeunesse studieuse se nourrissait de ses articles: il forma le go^ut esth'etique du public, il donna de la vigueur a la pens'ee. Sa critique p'en'etrait plus avant que celle de Pol'evo"i, soulevant d'autres questions et d'autres doutes. On l'a peu appr'eci'e; il y avait, lui vivant, trop d'amour-propres bless'es, trop do vanit'es froiss'ees; apr`es sa mort, le gouvernement d'efendit d''ecrire `a son sujet, et c'est ce qui m’a d'etermin'e `a m''etendre sur lui plus que sur un autre.

Son style 'etait souvent anguleux, mais toujours plein d''energie. Il communiquait sa pens'ee, comme il la concevait, avec passion. On sent dans chaque mot que cet homme 'ecrit avec son sang, on sent combien il d'epense et comme il se consume, maladif, irascible, il ne connaissait de limites ni `a l'amour ni `a la haine. Il 'etait souvent entra^in'e, parfois m^eme tr`es injuste, mais il resta toujours sainteement sinc`ere.

Une collision entre B'elinnski et les Slavophiles 'etait in'evitable.

Nous l'avons dit, c''etait un des hommes les plus libres n''etant li'e ni par les croyances ni par les traditions; ne d'ependant pas de l'opinion publique et n'acceptant aucune autorit'e-ne craignant ni la col`ere des amis, ni l''epouvante des belles ^ames Il 'etait toujours, en sentinelle de la critique, pr^et `a d'enoncer `a fl'etrir tout ce qu'il croyait r'eactionnaire. Comment pouvait-il donc laisser en paix les Slavophiles orthodoxes et ultrapatriotes lui qui voyait de lourdes cha^ines dans tout ce que les Slavophiles prenaient pour les liens les plus sacr'es?

Parmi les Slavophiles il y eut des hommes de talent, des 'eru-dits, mais pas un seul publiciste; leur revue (Le Moscovite) n'avait gu`ere de succ`es. Les hommes de talent de ce parti n''ecrivaient presque pas, les hommes incapables 'ecrivaient toujours.

Les Slavophiles avaient sur les Europ'eens un grand avantage, mais les avantages de ce genre sont pernicieux, ils d'efendaient l'orthodoxie et la nationalit'e, tandis que des Europ'eens attaquaient l'une et l'autre; ils pouvaient donc dire presque tout, sauf `a recevoir une d'ecoration, une pension, une place de pr'ecepteur `a la cour ou de gentilhomme de la chambre. B'elinnski, au contraire, ne pouvait rien dire; un mot trop transparent, une parole imprudente pouvaient le mener dans une casemate, compromettre le journal, le r'edacteur et le censeur. Mais ce fut l`a m^eme une raison pour laquelle toutes les sympathies furent acquises `a l''ecrivain t'em'eraire qui, en face de la forteresse de Pierre et Paul, d'efendait l'ind'ependance, et les antipathies furent pour ses adversaires qui montraient le poing abrit'es par le Kremlin et la cath'edrale de l'Assomption, si bien prot'eg'es par les «Allemands» de P'etersbourg. Tout ce que B'elinnski et ses amis ne disaient pas, on le devinait, on le suppl'eait. Tout ce que disaient les Slaves paraissait ou peu d'elicat ou peu g'en'ereux.

H^atons-nous d'ajouter que les Slavophiles n'ont cependant jamais 'et'e les partisans du gouvernement. Il y a certainement, `a P'etersbourg, des panslavistes imp'eriaux et, `a Moscou, des Slavophiles ralli'es, comme il y a des patriotes russes parmi les Allemands de la Baltique et des Gircassiens pacifi'es au Caucase, mais on ne parle pas de telles gens. Ce sont des amateurs de la servitude qui prennent l'absolutisme pour la seule forme civilis'ee d'un gouvernement, qui pr^echent la sup'eriorit'e des vins du Don sur les vins de la C^ote – d'Or et le russicisme aux Slaves occidentaux, en remplissant leur ^ame de cette noble haine des Allemands et des Magyars qui a si bien servi les Windischgraetz et les Haynau. Le gouvernement, sans reconna^itre leur doctrine officiellement, paie leurs frais de voyage et envoie `a leurs amis tchekhs et croates les croix holsteinoises de Ste-Anne, pr'eparant pour eux ces embrassements fraternels dans lesquels il a 'etouff'e la Pologne.

Quant aux v'eritables Slavophiles, leur bon rapport avec le gouvernement 'etait plut^ot un malheur qu'un fait d'esir'e. Mais telles sont les cons'equences de toute doctrine bas'ee sur l'autorit'e. Elle peut ^etre r'evolutionnaire dans un sens, mais elle est n'ecessairement conservatrice dans un autre et se trouve par cons'equent dans la triste alternative de s'allier `a son ennemi ou d'abandonner son principe. Une connivence avec son ennemi suffit pour r'eveiller la conscience.

B'elinnski et ses amis n'ont oppos'e aux Slaves ni une doctrine ni un syst`eme exclusif, mais une vive sympathie pour tout ce qui agitait l'homme contemporain; un amour sans bornes pour la libert'e de penser et une haine tout ausi forte contre tout ce qui l'entrave: l'autorit'e, la force ou la foi. Ils envisageaient la question russe et la question europ'eenne d'une mani`ere tout `a fait oppos'ee aux Slavophiles.

Il leur sembla qu'une des causes les plus graves de l'esclavage o`u se trouvait la Russie 'etait le manque de l'ind'ependance personnelle; de l`a l'absence compl`ete du respect de l'individu, du c^ot'e du gouvernement, et d'opposition, du c^ot'e des personnes; de l`a le cynisme du pouvoir et la longanimit'e du peuple. L'avenir de la Russie sera d'un grand danger pour l'Europe et plein de malheurs pour elle-m^eme, s'il n'entre des ferments 'emanci-pateurs dans le droit personnel. Un si`ecle encore du despotisme actuel, et toutes les bonnes qualit'es du peuple russe seront an'eanties.

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