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Том 7. О развитии революционных идей в России
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Герцен Александр Иванович

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Au lieu de cela, que faisaient les Slavophiles? Ils pr^echaient la soumission, cette premi`ere vertu de l''eglise grecque, cette base du tzarisme moscovite. Ils pr^echaient le d'edain de l'Occident qui seul pouvait encore 'eclairer l'ab^ime de la vie russe; ils pr^onaient enfin le pass'e, dont il fallait se d'efaire, au contraire, pour un avenir d'esormais commun `a l'Orient et `a l'Occident.

Il est 'evident qu'il fallait s'opposer `a une pareille direction des esprits, la pol'emique se d'eveloppa en effet de plus en plus. Elle dura jusqu'`a l'ann'ee 848 et atteignit son point culminant vers la fin de 1847, comme si l'on pressentait que, dans quelques mois, on ne pourrait discuter sur rien, en Russie, et que cette lutte devait p^alir devant la gravit'e des 'ev'enements.

Deux articles surtout exprim`erent les deux opinions contradictoires. L'un, sous le titre de «D'eveloppement juridique de la Russie», fut publi'e dans le Contemporain, `a P'etersbourg. L'autre fut une longue r'eponse d'un Slavophile ins'er'ee dans le Moscovite. Le premier article 'etait un expos'e clair et 'energique bas'e sur une 'etude approfondie du droit russe; il d'eveloppait la pens'ee que le droit personnel en Russie n'avait jamais atteint une d'etermination juridique, que l'individu avait 'et'e toujours absorb'e par la famille, par la commune, et plus tard, par l'Etat et par l''eglise. La position ind'efinie de la personne menait, suivant l'auteur, au m^eme vague dans les autres sph`eres de la vie politique. L'Etat profitait de ce manque de d'etermination pour empi'eter sur les libert'es, de sorte que l'histoire russe fut l'histoire du d'eveloppement de l'autocratie et de l'autorit'e, comme l'histoire de l'Occident est l'histoire du d'eveloppement de la libert'e et des droits.

Le danger du slavisme devient 'evident dans la r'eplique du Moscovite qui a puis'e ses arguments dans les chroniques slaves, le cat'echisme grec et le formalisme h'eg'elien. L'auteur slavophile croit que le principe personnel 'etait bien d'evelopp'e dans l'ancienne Russie, mais que la personne, 'eclair'ee par l''eglise grecque, poss'edait le don sublime de la r'esignation et transportait volontairement sa libert'e sur la personne du prince. Le prince exprime la compassion, la bienveillance et l'individualit'e libre. Chacun abdiquait son autonomie personnelle et la sauvait en m^eme temps dans le repr'esentant du principe individuel, le souverain.

Ce don d'abn'egation et le don encore plus grand de ne pas en abuser formaient, selon l'auteur, un accord harmonieux entre le prince, la commune et l'individu; accord admirable qui ne trouve d'autre explication chez l'auteur que la pr'esence extraordinaire du St. Esprit dans l''eglise byzantine.

Si les Slavophiles veulent repr'esenter une opinion s'erieuse, un c^ot'e r'eel de la conscience publique, une force enfin qui tend `a se r'ealiser dans la vie russe, s'ils veulent quelque chose de plus que des disputes arch'eologiques et des controverses th'eologiques, nous avons le droit d'exiger d'eux l'abandon de cet abus immoral de mots, de cette dialectique d'eprav'ee. Nous disons «abus immoral» parce qu'il se commet avec une parfaite connaissance de cause.

Que signifient ces solutions m'etaphoriques qui ne repr'esentent que l'inverse de la question m^eme? Pourquoi ces images, ces symboles, au lieu des choses? Est-ce que les Slavophiles ont 'etudi'e les annales du Bas-Empire pour s'inoculer cette l`epre byzantine? Nous ne sommes pas des Grecs du temps des Pal'eologue pour disputer de l'opus operans et le l'opus operatum, dans un temps o`u un avenir inconnu et immense frappe `a notre porte.

Leur m'ethode philosophique n'est pas nouvelle, le c^ot'e droit des h'eg'eliens parlait de la m^eme mani`ere, il y a une quinzaine d'ann'ees; il n'y a pas d'absurdit'e qu'on ne puisse faire entrer dans le moule d'une dialectique vide, en lui donnant un aspect profond'ement m'etaphysique. Il faut seulement ne pas savoir ou oublier que le contenu et la m'ethode ont un autre rapport que le plomb et le moule aux balles, et que le dualisme seul ne comprend pas la solidarit'e qui les lie. L'auteur en parlant du prince n'a fait que paraphraser la d'efinition tr`es connue que Hegel donne de l'esclavage, dans la Ph'enom'enologie (Herr und Knecht). Mais il a oubli'e avec pr'em'editation comment Hegel sort de ce degr'e inf'erieur de la conscience humaine. Il est `a remarquer que ce jargon philosophique qui appartient par la forme `a la science et par le contenu `a la scolastique, se retrouve chez les j'esuites. M. Montalembert, en r'epondant `a une interpellation sur les cruaut'es commises par le gouvernement papal dans les prisons de Rome, a dit: «Vous parlez des cruaut'es du pape, mais il ne peut pas ^etre cruel, sa position le lui d'efend, lui, le vicaire de J'esus Christ ne peut que pardonner, qu'^etre mis'ericordieux, et effectivement les papes pardonnent toujours. Le St. P`ere peut ^etre attrist'e, il peut prier pour le coupable, mais il ne peut ^etre implacable, etc.». – A la demande si l'on applique la torture `a Rome, l'on r'epond que le pape est cl'ement; au raisonnement que nous sommes tous esclaves, que le droit personnel n'est pas d'evelopp'e en Russie, l'on r'epond: «Nous l'avons sauv'e en le placant sur la t^ete du prince». D'erision qui provoque le m'epris de la parole humaine! S'appuyer sur la religion n'est gu`ere convenable, mais s'appuyer sur une religion obligatoire l'est encore moins. Chaque auteur a le droit incontestable de croire ce que bon lui semble-mais avoir recours aux preuves th'eologiques dans une discussion scientifique avec un homme qui tait sa religion, c'est manquer de convenances. Pourquoi s'abriter derri`ere un fort inexpugnable, contre lequel la moindre attaque m`ene au cachot?

D'ailleurs, il est impossible de comprendre comment les Slavophiles, si leur religion leur est vraiment ch`ere, n'ont pas de d'ego^ut pour la m'ethode hypocrite de la Philosophie de la religion, cette r'ehabilitation faible et sans foi, ce plaidoyer froid et p^ale, o`u la science orgueilleuse, apr`es avoir mis au tombeau sa soeur, lui jette un sourire de condol'eance? Comment ont-ils le courage de tra^iner ce qu'ils ont de plus sacr'e, dans des disputes, o`u l'on ne l'estime pas et o`u l'on ne le tol`ere que par respect pour la police!

Ce n'est pas tout; l'auteur de l'article s'en prend `a ses adversaires d'une mani`ere 'etrange pour leur manque de patriotisme, pour leur peu d'amour de la nation; comme c'est un trait g'en'eral parmi les Slavophiles, il faut en dire quelques mots. Ils pr'etendent au monopole du patriotisme, ils se croient plus russes que quiconque; ils nous reprochent continuellement notre indignation contre l''etat actuel de la Russie, notre peu d'affection pour le peuple, nos paroles am`eres et pleines de col`ere, notre franchise qui consiste `a faire voir le c^ot'e sombre de la vie russe.

Il semblerait pourtant qu'un parti qui s'expose `a la potence, aux mines, `a la confiscation des biens, `a l''emigration, ne manquait ni de patriotisme ni de conviction. Le 14 d'ecembre n'a pas 'et'e, que nous sachions, l'oeuvre des Slavophiles, toutes les pers'ecutions ont 'et'e r'eserv'ees `a nous, le sort a jusqu'ici 'epargn'e les Slavophiles.

Eh bien, oui, il y a de la haine dans notre amour, nous sommes indign'es, nous reprochons au peuple autant qu'au gouvernement l''etat o`u nous nous trouvons; nous ne craignons pas de dire les v'erit'es les plus dures, mais nous les disons parce que nous aimons. Nous ne fuyons pas du pr'esent dans le pass'e, car nous savons que la derni`ere page de l'histoire est l''etat actuel Nous ne fermons pas les oreilles aux cris de douleur du peuple, et nous avons le courage de constater, le coeur navr'e, combien l'esclavage le d'eprave; cacher ces tristes r'esultats, ce n'est pas de l'amour, c'est de la vanit'e. Nous avons sous les yeux le servage et l'on nous accuse de calomnie, et l'on ne veut pas que le triste tableau du paysan pill'e par la noblesse et le gouvernement, vendu presque au poids, d'egrad'e par les verges, mis hors la loi, nous poursuive nuit et jour comme un remords, comme une accusation? Les Slavophiles aiment mieux lire les l'egendes du temps de Vladimir, ils veulent qu'on leur repr'esente Lazare couvert non de plaies, mais d''etoffes de soie. Il faut 'elever pour eux comme pour Catherine des villages en carton et des jardins de coulisse le long des routes, de P'etersbourg jusqu'`a la Crim'ee.

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