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Том 7. О развитии революционных идей в России
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Герцен Александр Иванович

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Au prime abord, il para^it 'etrange que dans un pays dans lequel l'homme est presque chose, o`u il appartient au sol, o`u il fait partie de la propri'et'e et se vend avec elle, l'idol^atrie de la propri'et'e ait 'et'e la moins d'evelopp'ee. On la d'efend avec t'enacit'e chez nous, comme une proie, mais non comme un droit. Il 'etait difficile d'enraciner une foi dans l'infaillibilit'e et la justice d'un droit dont les absurdit'es 'etaient 'evidentes pour les deux parties; pour le seigneur qui poss'edait ses paysans, comme pour le paysan serf qui n''etait pas le propri'etaire de sa possession. On savait que l'origine des droits seigneuriaux 'etait assez obscure; on savait bien qu'une s'erie de mesures, arbitraires, mesures de police, avaient peu `a peu asservi la Russie agricole `a la Russie nobiliaire; on pouvait donc s'imaginer une autre s'erie de mesures qui l’ 'emancipassent.

Le manque m^eme de notions juridiques bien arr^et'ees, le vague dans les droits ne permettaient pas non plus aux id'ees de propri'et'e de se consolider, de prendre corps. Le peuple russe n'a v'ecu que de la vie communale, il ne comprend ses droits et ses devoirs que par rapport `a la commune. Hors d'elle il ne reconna^it pas de devoirs et ne voit que la violence. En s'y soumettant, il ne se soumet qu'`a la force; l'injustice flagrante d'une partie de la l'egislation l’а amen'e au m'epris de l'autre. L'in'egalit'e compl`ete devant le tribunal a tu'e en lui le germe du respect pour la l'egalit'e. Le Russe, `a quelque classe qu'il appartienne, enfreint la loi, partout o`u il peut le faire impun'ement; le gouvernement agit de m^eme. C'est p'enible et triste pour le moment, mais il y a un avantage immense pour l'avenir.

En Russie, derri`ere l''etat visible il n'y a pas d''etat invisible, qui ne soit que l'apoth'eose, la transfiguration de l'ordre de choses existant, il n'y a pas d'id'eal impossible qui ne co"incide jamais avec la r'ealit'e, tout en la promettant toujours. Il n'y a rien derri`ere les palissades o`u une force sup'erieure nous tient en 'etat de si`ege. La possibilit'e d'une r'evolution en Russie se r'eduit `a une question de force mat'erielle. C'est ce qui fait de ce pays, sans autres causes que celles que nous avons mentionn'ees, le sol le mieux pr'epar'e pour une r'eg'en'eration sociale.

Nous avons dit que, d`es l'apparition du saint-simonisme, apr`es 1830, le socialisme fit une grande impression sur les esprits, `a Moscou. On voyait dans cette doctrine l'expression d'un sentiment plus intime que dans les doctrines politiques, habitu'e qu'on 'etait aux communes, aux partages des terres, aux associations ouvri`eres. T'emoins de l'abus le plus exorbitant du droit de propri'et'e, nous 'etions moins froiss'es par le socialisme que le bourgeois occidental.

Peu `a peu les productions litt'eraires se p'en'etraient de tendances et d'inspirations socialistes. Les romans et les nouvelles m^eme les 'ecrits des Slavophiles protestaient contre la soci'et'e actuelle, d'un point de vue qui 'etait plus que politique. Il suf, fit de citer le roman de Dosto"ietski Les Pauvres Gens.

A Moscou le socialisme marchait de front avec la philosophie de Hegel. L'alliance de la philosophie moderne et du socialisme n'est pas difticile `a concevoir, pourtant ce n'est que dans ce dernier temps que les Allemands ont accept'e la solidarit'e entre la science et la r'evolution, non qu'ils ne la comprissent pas auparavant, mais parce que le socialisme, comme tout ce qui est pratique, ne les int'eressait pas. Les Allemands pouvaient ^etre profond'ement radicaux dans la science en restant conservateurs dans leurs actions, po`etes sur papier et bourgeois dans la vie. Le dualisme nous est, au contraire, antipathique. Le socialisme nous paraissait ^etre le syllogisme le plus naturel de la philosophie, l'application de la logique `a l'Etat.

Il est `a remarquer qu'`a P'etersbourg le socialisme rev^etait un autre caract`ere. L`a, les id'ees r'evolutionnaires ont toujours 'et'e plus pratiques qu'`a Moscou; leur fanatisme froid est celui des math'ematiciens; `a P'etersbourg on aime la r'egularit'e, la discipline, l'application. Pendant qu'on dispute `a Moscou, on s'associe `a P'etersbourg. La franc-maconnerie et le mysticisme avaient leurs adeptes les plus ardents dans cette derni`ere ville, c'est l`a que se publiait le Messager de Sion, organe de la soci'et'e biblique. La conjuration du 14 d'ecembre a m^uri `a P'etersbourg, elle ne se serait jamais assez d'evelopp'ee `a Moscou pour descendre sur la place publique. A Moscou, il est tr`es difficile de s'entendre; les individualit'es sont trop capricieuses et trop 'epanouies. AMoscou, il y a plus d''el'ements po'etiques, plus d''erudition et avec cela plus de nonchalance, de laisser-aller, plus de paroles inutiles, plus de divergence d'opinions. Le saint-simonisme vague, religieux et en m^eme temps analytique allait merveilleusement bien aux moscovites. Apr`es l'avoir 'etudi'e, ils passaient tout naturellement `a Proudhon, comme de Hegel `a Feuerbach.

Le fouri'erisme plus que le saint-simonisme convient `a la jeunesse studieuse de P'etersbourg. Le fouri'erisme, qui ne tendait qu'`a une r'ealisation imm'ediate, qui voulait l'application pratique, qui r^evait, lui aussi, mais qui appuyait ses r^eves sur des calculs arithm'etiques, qui cachait sa po'esie sous le titre d'industrie et son amour de libert'e sous l'embrigadement des ouvriers, le fouri'erisme devait trouver un 'echo `a P'etersbourg. Le phalanst`ere n'est autre chose qu'une commune russe et une caserne de travailleurs, une colonie militaire sur le pied civil, un r'egiment industrieux. On a remarqu'e que l'opposition qui lutte de Iront avec un gouvernement a toujours quelque chose de son caract`ere mais en sens inverse. Et je crois bien qu'il y a quelque fond de v'erit'e dans la crainte que le gouvernement russe commence `a avoir ducommunisme: le communisme с'est l'autocratie russe renvers'ee.

P'etersbourg devancera Moscou, au nom de ces opinions tranch'ees, born'ees peut-^etre, mais actives et pratiques. L'honneur de l'initiative lui appartiendra avec Varsovie, mais si le tzarisme succombe, le centre de la libert'e sera dans le coeur de la nation, `a Moscou.

L'avortement complet de la r'evolution en France, la malheureuse issue de la r'evolution de Vienne et la fin comique de celle de Berlin furent en Russie le commencement d'une r'eaction redoubl'ee. Tout fut paralys'e de nouveau, le projet de l''emancipation des serfs abandonn'e et remplac'e par celui de fermer toutes les Universit'es; on cr'ea une double censure et de nouvelles difficult'es `a la remise des passeports pour les pays 'etrangers. On poursuivit les journaux, les livres, les paroles, les costumes, les femmes et les enfants.

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