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La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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Аллен Марсель

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D’un coup d’oeil, Juve interrogea le procureur. Peut-^etre M. Anselme Roche connaissait-il le jeune militaire ?

— Monsieur, expliqua, en effet, le procureur, est le fr`ere de Mme Delphine Fargeaux, 'epouse de M. Fargeaux, propri'etaire du ch^ateau de Garros, `a quelques kilom`etres d’ici. Nous vous 'ecoutons, Monsieur.

— H'elas, reprit le jeune spahi, ma d'eposition sera tr`es br`eve, mais je vous avoue que j’ai grand-peur qu’elle ne soit aussi tr`es grave. Messieurs, je me demande ce qu’est devenue ma soeur Delphine, qui a disparu.

— Votre soeur a disparu ? r'ep'eta Juve, elle a r'eellement disparu ? Eh, eh, c’est int'eressant. Mais voyons, ne vous trompez-vous pas ?

Le spahi, tout d’abord, s’'etait assis, lui aussi, sur un geste du procureur de la R'epublique. Mais il se releva `a son tour, une soudaine col`ere empourpra son visage. Il parlait non plus avec calme, mais avec une extr^eme violence :

— Je suis s^ur de mon fait. 'Ecoutez-moi. Ma soeur, Delphine est une femme exquise, mari'ee `a un rustre, un grossier personnage, une sorte de paysan enrichi, mon beau-fr`ere, M. Fargeaux. Un mariage, Messieurs, qui fait ma honte et mon d'esespoir. Voyez-vous ma soeur condamn'ee `a vivre dans ce ch^ateau de Garros, aux c^ot'es d’un homme qui n’est jamais pr'eoccup'e que du prix du ma"is, du co^ut de la r'esine ou m^eme de l’engraissement des cochons ? Une honte, vous dis-je. Enfin, je passe.

— Passez.

— Ma soeur n’a pas d’enfant. Elle s’ennuie. Sa seule distraction, l’unique distraction, entendez-vous, que lui permette son mari, consiste en de courtes promenades qu’elle fait aux environs de Garros. Moi, d’ordinaire, je suis absent, en garnison en Alg'erie. Exceptionnellement, j’ai un cong'e de convalescence, et c’est pourquoi vous me voyez ici. Bref, ma soeur est sortie, a 'et'e se promener sur la grand-route, des paysans l’ont vue, elle marchait tranquillement, et elle n’est pas revenue. Mon beau-fr`ere, naturellement, ne s’est inqui'et'e de rien, il m’a dit : « Votre soeur est partie en voyage. » Je l’ai d’abord cru. Puis je me suis 'etonn'e que Delphine ne m’ait pas pr'evenu. Puis j’ai 'ecrit de diff'erents c^ot'es. Je me suis inform'e. J’ai fait une enqu^ete. Enfin, Monsieur, comprenez mon 'emoi lorsque, il y a vingt-quatre heures, en lisant un journal local, j’apprends qu’un crime myst'erieux avait 'et'e commis ici, `a deux pas de Garros, et qu’on ne savait ni quelle 'etait la victime, ni quel 'etait l’assassin. Messieurs, je suis fou d’angoisse, depuis ce moment, renseignez-moi. Savez-vous quelque chose ?

— Monsieur, d'eclara Juve, je me demande s’il y a la moindre co"incidence, le moindre rapprochement `a faire entre l’absence de Mme votre soeur et le drame qui nous pr'eoccupe. Connaissiez-vous les Borel ? Votre soeur avait-elle une raison de se rendre chez eux ?

De rouge qu’il 'etait, le spahi devint cramoisi :

— Ma soeur, d'eclara-t-il, est un femme irr'eprochable digne du nom qu’elle porte, qu’elle portait 'etant jeune fille, veux-je dire, digne de mon nom, enfin, et il est inutile, au sujet de sa disparition, d’'echafauder des hypoth`eses louches.

— Je ne vous parle pas de cela, interrompit Juve.

— Je l’imagine bien, morbleu, ou ca ne se passerait pas comme ca ! Seulement, c’'etait une d'eclaration utile `a faire. Autre chose : vous me demandez si ma soeur connaissait les Borel ? Oui, mais tr`es peu. Elle entretenait avec eux des relations de bon voisinage. Moi, je connaissais Mme Borel bien plus intimement.

M. Anselme Roche, `a son tour, parut vivement 'emu :

— Vous connaissiez Mme Borel ? interrogea-t-il d’une voix soupconneuse, d'esagr'eable presque.

— Oui, Monsieur. Une femme charmante, exquise, belle `a ravir, dou'ee de toutes les qualit'es, s'eduisante au possible.

— Vous la connaissiez beaucoup ? insistait le magistrat.

— Assez, oui.

— Vous lui rendiez visite souvent ?

— Tr`es souvent.

— Monsieur, d'eclara s`echement le procureur en se levant, pour marquer que l’audience 'etait termin'ee, je prends bonne note de vos d'epositions. Vous pouvez retourner au ch^ateau de Garros, si j’avais une communication `a vous faire, vous seriez imm'ediatement mand'e.

***

Deux heures plus tard, en compagnie du procureur de la R'epublique, Juve, apr`es avoir minutieusement fouill'e la maison, demeurait fort perplexe.

Pour Juve, en effet, l’hypoth`ese du crime 'etait radicalement d'emontr'ee par l’aspect m^eme des lieux. `A coup s^ur, quelqu’un avait 'et'e tu'e au rez-de-chauss'ee. Le corps avait saign'e longtemps sur le sol avant qu’on l’emport^at. Mais o`u l’avait-on emport'e ?

— Si le meurtre avait eu lieu ici, disait Juve, montrant le milieu de l’unique pi`ece donnant de plain-pied sur la route, je ne vois pas du tout pourquoi l’assassin se serait donn'e la peine de monter le cadavre au premier 'etage, comme en font foi cependant les traces de sang qui subsistent encore sur l’escalier et sur le tapis de cette chambre-boudoir. Je vois encore moins ce qu’il a pu faire du cadavre, une fois en haut, o`u les traces de sang s’arr^etent `a deux m`etres de la baignoire.

Poursuivant brusquement ses investigations, cherchant toujours `a donner une explication au myst`ere invraisemblable qu’il 'etudiait, Juve ajouta :

— Autant qu’on peut en juger d’ailleurs, 'etant donn'ee la disposition des lieux, il est vraisemblable qu’un homme seul a pu hisser le cadavre par ce petit escalier. Ceci conduirait `a conclure que Mme Borel n’est pas, ne peut pas ^etre l’assassin, qu’elle serait plut^ot la victime.

Par acquit de conscience, Juve, une derni`ere fois, entreprit le tour du logis dramatique et, soudain, en se baissant pour examiner, au premier 'etage, le dessous d’un grand divan, il fit une d'ecouverte extraordinaire :

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