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— Chonchon, demandait Chamb'erieux, qu’est-ce que cela signifie ? Tu es la ma^itresse du marquis de Tergall ? R'eponds, dis la v'erit'e. Ah, je m’en doutais bien que tu me trompais.
Le marquis de Tergall avait crois'e les bras, furieux il consid'erait la chanteuse, grommelant `a part :
— Parbleu, j’en 'etais s^ur, elle me le cachait, mais elle 'etait la ma^itresse de cet usurier.
Sur un signe de Juve, M. Morel n’avait pas interrompu cette petite sc`ene de m'enage – ou pour mieux dire de faux m'enage – et il esp'erait que de cette discussion allait peut-^etre jaillir la lumi`ere.
Quelques instants auparavant, Juve en effet avait dit `a M. Morel :
— La bague de cette femme est l’un des bijoux vol'es `a l’ H^otel Europ'een. Elle l’ignore 'evidemment, sans quoi elle ne l’aurait pas port'ee de facon ostentatoire. Il faut savoir d’elle quel est le donateur de ce bijou, et puisqu’elle m’a d'eclar'e que c’'etait son amant, 'etant donn'e qu’elle en a deux, il faut l’obliger `a pr'eciser.
Mais non, ce n’'etait ni l’usurier-bijoutier, ni le gentilhomme. M. Morel r'ecapitula :
— La situation me para^it tr`es simple : M lle Chonchon a formellement d'eclar'e que cette bague lui avait 'et'e offerte par son amant. Or, nous venons d’apprendre, de l’aveu m^eme des int'eress'es, que mademoiselle `a deux amants. Je lui repose donc la question : lequel de ces deux messieurs…
Juve l’emp^echa de terminer.
Depuis quelques instants, il 'echangeait des signes avec l’infortun'ee Chonchon.
— Je vous serais tr`es reconnaissant, monsieur le juge, dit-il, de faire sortir pendant quelques instants M. Chamb'erieux et M. de Tergall.
Ils protest`erent `a grand bruit, mais M. Morel s’inclina.
— Je vous en prie, messieurs, n’insistez pas et sortez, leur dit-il. Toutefois, demeurez `a la disposition de la Justice, j’aurai peut-^etre besoin de vous tant^ot.
Baissant la t^ete, Chamb'erieux se retira, suivi du marquis.
Chonchon remercia Juve d’un sourire.
Quant au policier, il expliquait au magistrat :
— Mademoiselle m’a fait signe, il y a un instant, qu’elle avait une r'ev'elation int'eressante `a nous faire, mais qu’elle pr'ef'erait ne pas s’expliquer devant « ses amis ».
M. Morel comprenant qu’avec de la douceur on obtiendrait tout ce qu’on voudrait de Chonchon, la regarda d’un air bienveillant.
— Venez aupr`es de moi, mademoiselle, lui dit-il, et ne craignez rien. Vous voyez que nous ne demandons qu’`a arranger les choses, qu’`a vous ^etre agr'eables.
Chonchon ne l’entendait pas de cette oreille :
— Eh bien, merci, vous pouvez me passer de la pommade maintenant et me casser du sucre sur le nez, cela n’emp^eche qu’avec vos sacr'ees questions de tout `a l’heure, vous m’avez brouill'ee avec mes amants, et des amants par le temps qui court, g'en'ereux comme ces types-l`a, ca ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval.
— Ca s’arrangera voyons.
— Non, mais c’est vous qui allez r'eparer la casse ?
Le magistrat redevint s'erieux :
— Voyons, assez plaisant'e. Nous voulons bien avoir `a votre 'egard, mademoiselle, de la condescendance et de la familiarit'e, mais il y a des limites, que l’on ne saurait d'epasser sans porter atteinte au prestige de la magistrature. Maintenant, dites-nous vite comment les choses se sont pass'ees dans la r'ealit'e.
Chonchon se d'ecida `a parler, plus libre, plus confiante d'esormais, depuis qu’on l’avait 'eloign'ee de son couple d’amants.
— Voil`a, commenca-t-elle, un peu g^en'ee, mais s’enhardissant `a mesure, voil`a : ce que j’ai dit `a monsieur, cette nuit, est exact. On m’a bien donn'e cette bague, et c’'etait bien un amant, bien mon amant, mais ni Chamb'erieux, ni Tergall.
— Alors, un troisi`eme ?
— Et reprit M. Morel, voulez-vous nous dire qui ?
Chonchon parut g^en'ee, rougit, balbutia.
— Vous dites ?
— Je dis, r'ep'eta Chonchon, que c’est le cur'e.
— Le cur'e ?
— Le cur'e, `a vrai dire, je ne sais pas s’il est cur'e, mais enfin c’est un pr^etre.
— Ce que vous venez de dire est tr`es important. Mais il faut pr'eciser, mademoiselle, n’oubliez pas un seul d'etail, racontez-nous comment la chose s’est pass'ee. Comment s’appelle ce pr^etre ?
— Ca, je ne sais pas.
— Comment, c’est votre amant, et vous ne connaissez pas son nom ?
— Dame, vous devez comprendre, surtout quand il s’agit d’un monsieur pr^etre. Ils n’aiment pas crier sur les toits comment ils s’appellent.