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— Eh bien ? alors ?…
— Alors, Tom Bob, c’est affolant. `A peine suis-je chez Francoise, aux c^ot'es de Nini, pr`es de la malade, que ma conviction est faite… Oui, le diagnostic du premier m'edecin est fond'e : Francoise Lemercier meurt, et meurt empoisonn'ee. Mais par qui ? comment ? Tom Bob, j’ai provoqu'e, aujourd’hui m^eme, la r'eunion de trois grands m'edecins. Ils sont tomb'es d’accord qu’en effet il y avait bien empoisonnement. Cela, c’est la certitude indiscutable. Mais cette certitude, je ne sais comment l’expliquer. Je vous dis que Francoise est empoisonn'ee et qu’elle ne prend pas de poison.
— Vous ^etes s^ure des aliments ? de la boisson ?
— S^ure. Oui. En ma qualit'e d’infirmi`ere, j’ai d'ecid'e qu’elle ne serait nourrie que de lait, du lait, Tom Bob, qui m’est envoy'e directement par une compagnie fermi`ere, sous bouteilles plomb'ees. Ces bouteilles plomb'ees, c’est moi qui les ouvre. Personne d’autre. Ce lait, j’en ai bu. Il ne m’a fait aucun mal. Ce n’est donc pas lui qui empoisonne Francoise. Et, pourtant, chaque jour elle d'ep'erit. C’est inimaginable, c’est incompr'ehensible.
— Un gaz malsain ?
— Non, j’y ai pens'e, mais c’est impossible. Je ne quitte pas le lit de Francoise, je suis tout le temps `a c^ot'e d’elle. Si c’'etait par l’air qu’elle respire qu’on l’empoisonne, je serais empoisonn'ee comme elle, or, ni moi, ni les voisines qui viennent parfois lui rendre visite, ni m^eme Nini, nous ne souffrons d’aucun malaise. Tenez, Tom Bob, vous me comprenez bien ? voil`a la situation : Francoise est en ce moment dans son lit, elle n’en sort pas, elle ne boit que du lait qui est pur, elle ne respire qu’un air qui est pur et, pourtant, un myst'erieux criminel est `a l’oeuvre qui la tue avec du poison…
— C’est fou, mistress Davis, c’est impossible.
— Cela est, Tom Bob…
— Non, non, et non, il y a quelque chose que vous n’avez pas su voir, mistress Davis…
— Je passe mon temps `a chercher.
— Sans rien trouver ?
— Sans rien trouver.
— Ah ! vous ne savez pas enqu^eter alors.
— Les docteurs non plus n’ont pas su…
— Les docteurs sont des imb'eciles, des ^anes, mais vous, Davis, vous, vous qui appartenez `a la police, vous ne pouvez pas laisser p'erir Francoise ? Je l’aime Francoise vous m’entendez ? Il faut que vous la sauviez.
— Je donnerais ma vie pour cela, Tom Bob.
— Vous ^etes certaine que Nini ?
— Nini ne l’approche qu’en ma pr'esence… je pousse la pr'ecaution jusqu’`a faire avec elle le lit de Francoise… ainsi…
De grosses larmes coulaient maintenant du visage amaigri de Tom Bob…
— Et dire, dire, r^ala-t-il, dans un terrible acc`es de d'esespoir, et dire que je suis prisonnier, et qu’on me la tue, et que je n’y puis rien.
D’une voix, qui bouleversait mistress Davis jusqu’au fond de l’^ame, le malheureux acheva :
— Ah fatalit'e, fatalit'e, tout est donc contre moi ? Voil`a donc l’heure o`u moi qui n’avais jamais eu peur, je dois suer d’angoisse, je dois crier mis'ericorde ? Fatalit'e ! il n’y a plus que lui, que lui qui puisse la sauver…
La douleur du condamn'e 'etait horrible… il prononcait d’'etranges paroles en v'erit'e…
Mistress Davis interrogea d’une voix sourde :
— Il n’y a plus que « lui » qui puisse la sauver, dites-vous ?… Tom Bob, de qui parlez-vous ?
`A la question nette et pr'ecise de mistress Davis, Tom Bob semblait h'esiter :
— Lui ? r'ep'etait-il, lui ? ah, vous devriez le comprendre, je parle… de Dieu.
Mistress Davis regardait, interloqu'ee, Tom Bob…
Tom Bob n’avait jamais manifest'e une grande pi'et'e, cela avait m^eme souvent attrist'e le r'ev'erend Hope, et voil`a que maintenant il invoquait le Seigneur ?
— Que faire ?… que faire ? r'ep'eta la jeune femme…
Tom Bob, d’un bond se redressa :
— Avant tout, disait-il, retournez d’urgence pr`es de Francoise. Votre surveillance, si elle ne peut la sauver, doit au moins suffisamment g^ener les assassins pour rendre plus difficile leur horrible besogne… allez… allez… moi je vais aviser…
Et comme mistress Davis, tr`es surprise de l’attitude du condamn'e, s’appr^etait `a partir sans autre remarque, Tom Bob la rappela :
— Dites, Davis, ordonnait-il d’une voix calme, en passant au poste des gardiens, demandez donc que l’on m’envoie le policeman charg'e de faire avec moi ma partie de cartes quotidienne…