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— Crois-tu, petit, que la mort me fait peur et que la crainte de Fant^omas puisse m’emp^echer d’accomplir mon devoir ? Il n’aurait pas de piti'e pour moi, sans doute, je le sais, peu importe. J’ai d'ecid'e d’agir et j’agirai comme je l’entends, quoi qu’il arrive. Entre Fant^omas et moi, c’est la lutte sans merci, il ne saurait y avoir de compromis entre le monstre qu’il est et l’honn^ete homme que je suis.
— Justement, j’ai quelque chose, Juve, `a vous demander, quelque chose qu’il faut m’accorder, me promettre. Dites que vous ne me contrarierez pas, que j’obtiendrai satisfaction.
— Hum, fit Juve, je n’aime pas beaucoup acheter chat en poche. Explique-toi d’abord.
Rassemblant son courage, Fandor raconta au policier les d'etails extraordinaires de l’effroyable lutte qu’il venait de vivre y compris la chute dans l’oubliette, la menace de mort affreuse dont il 'etait l’objet et enfin sa lib'eration par Fant^omas, Fant^omas qui, pour la premi`ere fois, tenait sa parole.
— Est-ce fini ?
— Non. J’ai rendez-vous, dans quatre jours, avec Fant^omas, `a cinq heures du soir, pour lui remettre les papiers d’H'el`ene.
— O`u ?
— Dans votre appartement, rue Bonaparte, `a Paris.
— Bien.
— Il est bien entendu avec Fant^omas que la lutte reprendra sans tr^eve ni merci, `a dater de l’instant m^eme o`u je lui aurai restitu'e les papiers de sa fille.
— Restitu'e les papiers. Ah ca, Fandor, es-tu devenu compl`etement fou ?
— Pourquoi ?
— T’imagines-tu que je m’en vais te rendre ces documents pour que tu t’en ailles les porter `a ce bandit et que nous perdions ainsi, b'en'evolement, le plus gros atout dans notre jeu, qui nous permet d’esp'erer gagner la partie ?
— Juve, j’ai donn'e ma parole d’honneur.
— On ne se d'eshonore pas, Fandor, en manquant de parole `a Fant^omas.
— Je vous demande bien pardon, Juve, du moment que j’ai engag'e ma parole, peu importe `a qui.
— D’accord, fit Juve, la parole donn'ee est une chose respectable, et j’estime, comme toi que l’on ne transige pas avec une telle promesse. Mais moi je n’ai rien promis du tout. Or, c’est moi qui poss`ede les papiers.
Fandor, qui s’'etait lev'e et approch'e du lit de Juve, recula, d'esesp'er'e, se laissa tomber sur un fauteuil.
— Juve, je vous en prie, rendez-vous compte de la situation dans laquelle je me trouve. Vous aviez, jusqu’`a pr'esent, le devoir de lutter contre Fant^omas par tous les moyens, c’est possible. Mais `a l’heure actuelle je suis redevable, moi, de quelque chose `a Fant^omas, et ce quelque chose, c’est ma vie, en 'echange de laquelle j’ai donn'e ma parole au bandit, il faut que je la tienne.
— Eh bien, tiens-la, Fandor. Tu es robuste, solide, libre de tes mouvements. Moi, je suis infirme, paralys'e.
— Oh, Juve, supposez-vous un seul instant que je serais capable d’agir par la force.
— Il est des cas, fit-il, o`u on se demande quelle est l’attitude `a observer la plus 'equitable. Tu as donn'e ta parole, Fandor, de livrer `a Fant^omas des documents que tu sais que je poss`ede et que je refuse de te donner. Si tu veux les prendre, tenir ta promesse, tu sais qu’il te faudra user de violence.
— Et dans ces conditions ?
— Ce sera `a mon tour de te r'epondre de la m^eme facon.
— Juve, vous me mettez dans une situation inextricable.
— 'Ecoute, Fandor, fit-il, laissons cela. Fant^omas, m’as-tu dit, a 'ecrit sous tes yeux une lettre dans laquelle il s’accuse de l’assassinat d’Herv'e Martel, dans laquelle il se vante d’avoir voulu torpiller le sous-marin ?
— Il a 'ecrit tout cela, je l’ai vu, de mes yeux vu.
— Donc, poursuivit le policier, de plus en plus 'enigmatique, cette lettre, lorsqu’elle parviendra `a destination, c’est-`a-dire lorsqu’elle te sera remise, non seulement t’innocentera, mais encore incriminera Fant^omas ?
— C’est exact. O`u voulez-vous en venir ?
— `A ceci, Fandor.
Juve, p'eniblement, leva le bras et appuya trois fois sur un bouton de sonnette.
On frappait `a la porte.
— Entrez, dit Juve.
Deux hommes entr`erent.
— Emparez-vous de lui, ordonna Juve.
Nalorgne et P'erouzin consid'er`erent Fandor stup'efaits, puis P'erouzin s’'ecria, tendant cordialement la main au journaliste :
— Mais au fait, c’est notre coll`egue de la police locale de Cherbourg. Comment allez-vous, cher monsieur ?