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Le convoi dans lequel Fant^omas prenait place 'etait toutefois quelques instants plus tard victime d’un incident qui devait suffire `a donner l’'eveil au Ma^itre de l’effroi.
Fandor faisait des signaux sur la voie, contraignait le m'ecanicien `a bloquer ses freins, puis disparaissait…
Les voyageurs, lorsque le train repartait, 'etaient tous d’accord pour affirmer que le m'ecanicien s’'etait tromp'e. Fant^omas, lui, 'etait fort tent'e de croire le contraire.
Le G'enie du crime, en effet, 'etait beaucoup trop avis'e, beaucoup trop r'efl'echi, pour admettre si facilement une erreur de la part d’un homme qui jurait ses grands dieux avoir vu, avoir bien vu, un homme 'etendu sur la voie, et faisant des gestes de d'etresse.
Fant^omas, d`es lors, soupconneusement, se disait :
— C’est bizarre…
Si Fant^omas, d’ailleurs, voulait r'efl'echir, il songeait que le train dans lequel il venait de prendre place l’avait en quelque sorte ramen'e sur ses pas, et que son arr^et avait 'et'e occasionn'e `a tr`es peu de distance de l’endroit o`u J'er^ome Fandor devait pr'ecis'ement se trouver.
De l`a `a conclure que l’inexplicable arr^et du train pouvait ^etre imput'e `a l’intervention de Fandor, il n’y avait pas tr`es loin, et Fant^omas ne manquait pas de se poser la question.
C’'etait donc l’esprit en 'eveil que Fant^omas arrivait `a Bruxelles et descendait du wagon de seconde classe o`u il 'etait mont'e avec ses habits d’apache, ses vieux habits, sans la moindre vergogne.
Mais Fant^omas n’'etait pas plut^ot descendu sur le quai qu’il se disait, tout naturellement :
— Si j’'etais Fandor, que ferais-je ? `a supposer que Fant^omas se trouve dans ce train ?
Imm'ediatement Fant^omas se r'epondit :
— Je me pr'ecipiterais vers la sortie et j’irais guetter les personnes qui sortent !
Ayant d'ecid'e ce que devait faire Fandor, Fant^omas imm'ediatement tirait parti de sa pens'ee : il examinait de loin la sortie de la gare de Bruxelles, et tout naturellement il apercevait l`a, masqu'e par un tas de bagages, un homme habill'e en bleu qui n’'etait autre que J'er^ome Fandor.
— Tr`es bien, se dit Fant^omas. C’est absolument parfait…
Et tranquillement il revint vers son wagon, `a peine contrari'e par la pens'ee que J'er^ome Fandor, loin d’abandonner sa poursuite, 'etait tout au contraire acharn'e sur sa piste.
Le Ma^itre de l’effroi, quelques instants plus tard, souriait :
— Eh bien, soit, d'ecidait-il, puisque Fandor est l`a, finissons-en…
Loin de se cacher, Fant^omas se promenait ostensiblement le long du train, ne cherchant nullement `a 'eviter Fandor.
C’'etait Fandor, en effet, qui 'evitait le bandit, et Fant^omas, qui le surveillait du coin de l’oeil, sans en avoir l’air regardant dans une glace qui lui permettait de voir derri`ere lui, discernait parfaitement la course rapide du journaliste se pr'ecipitant au t'el'egraphe pour c^abler `a la S^uret'e.
— Allons, pensa Fant^omas `a ce moment, J'er^ome Fandor va encore avoir le dessus ! Il s’appr^ete en tout cas `a me faire prendre plus tard, il donne des instructions pour notre arriv'ee, j’ai toutes les chances du monde de pouvoir voyager tranquillement !
Fant^omas regagna son compartiment, s’enveloppa d’une couverture de laine, baissa la lampe bleue de son wagon, et s’endormit.
Il 'etait difficile au Ma^itre de l’effroi, toutefois, de sommeiller tranquillement alors qu’il connaissait, dans le m^eme train que lui, la pr'esence de cet adversaire acharn'e qu’'etait J'er^ome Fandor.
Fant^omas, bient^ot, renonca `a dormir, et se prit `a songer :
— Que diable a pu t'el'egraphier cet infernal journaliste ?… pensait-il.
Et en d'epit de son flegme, Fant^omas devenait, au fur et `a mesure que les heures passaient, quelque peu nerveux.
— Je suis peut-^etre imprudent ? se demandait-il. Je ne m’occupe pas assez de ce qui se trame contre moi…
`A la fronti`ere, pendant les op'erations de douane, Fant^omas courut au t'el'egraphe.
L`a, avec un toupet infernal, il exp'ediait une d'ep^eche au commissariat sp'ecial de la gare du Nord :
Avez-vous bien recu mon t'el'egramme ?… Pour la bonne r`egle, r'eexp'ediez-le moi en double…
Et il signait : Fandor,et il donnait comme adresse le dernier arr^et du train avant son arriv'ee `a Paris.
Les choses se passaient tout naturellement comme l’avait pr'evu Fant^omas. Au commissariat sp'ecial de la gare du Nord, on imaginait que le journaliste, inquiet de savoir si ses ordres avaient bien 'et'e scrupuleusement ex'ecut'es, demandait une confirmation, on r'epondait fort r'eguli`erement pour le tranquilliser.