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Fant^omas souriait bonassement ; il allait peut-^etre confesser `a Ma Pomme que la ruse avait r'eussi, et qu’en r'ealit'e Juve et Fandor se trouvaient dans le m^eme train o`u ils 'etaient tous les deux, lorsque `a cet instant, brusquement, ob'eissant sans doute `a quelque signal d’un disque, le train s’arr^eta.
Il y avait alors de brusques soubresauts, les wagons se heurtant les uns les autres, et cela devait occasionner le r'eveil du paralytique, car celui-ci bougeait, se penchant en avant, au risque de perdre son 'equilibre.
`A cet instant, Fant^omas se levait, se pr'ecipitait, et d’une bourrade, redressait le malade. Son geste 'etait si brutal, si tranquille, que Ma Pomme s’'etonna :
— Au fait, demandait l’apache, qui est-ce donc, ce gaillard-l`a ? Et s’il m’est permis de vous interroger, Fant^omas, pourquoi ^etes-vous d'eguis'e en femme ?
La question 'etait assez naturelle, Fant^omas, en l’'ecoutant, sourit tout en haussant les 'epaules.
— Heu, fit-il 'enigmatiquement, ce sont des affaires assez compliqu'ees. Il n’emp^eche, Ma Pomme, que je veux bien, pour te faire plaisir, te donner quelques renseignements : ce paralytique s’appelle Daniel. Tu ne le connais pas, mais cela n’a aucune importance. Va donc lui serrer la main.
Fant^omas parlait sur un ton si bizarre que Ma Pomme, `a cet instant, le consid'era avec une certaine 'emotion.
— Qu’est-ce que cela veut dire ? pensait-il. Pourquoi dois-je aller serrer la main `a ce Daniel qui ne doit pas faire partie de la bande, car je n’en ai jamais entendu parler ?
Assez intrigu'e, Ma Pomme interrogea :
— Mais il a l’air de dormir, votre Daniel ?
— Cela ne fait rien, r'epliqua Fant^omas. Serre-lui toujours la main.
Ma Pomme se leva, s’approcha du malade.
Or, comme il arrivait, la main tendue, aupr`es de celui-ci, l’apache, brusquement, se rejetait en arri`ere, poussant un sourd juron.
— Ah, nom de Dieu, faisait-il.
Et en m^eme temps, il contemplait le paralytique avec une 'etrange insistance.
Fant^omas, toutefois, 'eclatait de rire.
— Eh bien, demandait le bandit ? Tu ne lui serres pas la main ?
Mais, Ma Pomme, immobile, contemplait toujours le malade. Il demandait bient^ot :
— Mais, Fant^omas, je… je… je ne me trompe pas ?
Fant^omas eut un 'eclat de rire encore plus violent.
— Eh non, d'eclarait-il `a l’apache. Tu ne te trompes pas.
Et comme Ma Pomme le regardait avec des yeux d’'epouvante, Fant^omas brusquement ajoutait :
— Tu l’as bien devin'e, Ma Pomme, ce paralytique, ce n’est pas un paralytique, c’est un mort… c’est un cadavre, c’est le cadavre d’un nomm'e Daniel, c’est un cadavre qui va me servir `a la plus terrible des vengeances !…
Fant^omas n’avait point menti. Il 'etait profond'ement exact que le soi-disant paralytique qu’il avait eu l’audace d’emmener dans ce train, le faisant passer pour son fils, apr`es s’^etre lui-m^eme grim'e en vieille femme, 'etait le cadavre de ce fameux Daniel, ce jeune homme, aux allures 'etranges qui semblait ^etre un policier, dont Juve et Fandor avaient remarqu'e la pr'esence dans la p`egre d’Amsterdam alors qu’ils cherchaient H'el`ene, que Fant^omas avait assassin'e d’un coup de poignard dans la propri'et'e de M. Eair, le jour m^eme o`u Beno^it le Farinier et Geoffroy la Barrique, fort 'emus des bruits qu’ils entendaient dans le jardin, interrompaient leur beuverie pour s’enfuir en toute h^ate et tenter, dans leur candeur, de regagner Paris `a pied, supposant qu’ils n’en 'etaient gu`ere 'eloign'es.
Pourquoi Fant^omas avait-il tu'e Daniel ? C’'etait 'evidemment son secret. Secr`ete aussi 'etait l’intention qu’il avait de se servir de ce cadavre pour une terrible vengeance !
Fant^omas n’'etait pas homme, en effet, `a agir `a la l'eg`ere, au hasard, sans plan bien net, sans d'esir bien arr^et'e.
Il nourrissait 'evidemment depuis quelque temps d’importantes intrigues, de redoutables projets. S’il avait exp'edi'e Ma Pomme `a Bruxelles avec mission de simuler un vol et de faire croire `a la police officielle que Fant^omas se trouvait dans la capitale de la Belgique, s’il avait tu'e l’inconnu r'epondant au nom de Daniel, s’il avait pouss'e l’audace jusqu’`a emmener cet inconnu sous les apparences d’un paralytique dans le train de Paris, c’'etait 'evidemment qu’il avait de graves motifs pour agir ainsi, c’'etait tr`es certainement qu’il entreprenait une fois encore quelques-unes de ces sombres intrigues qui tant de fois avaient endeuill'e le monde et hauss'e son personnage de l'egende, sa r'eputation de Roi du crime, de Ma^itre de l’effroi.
Fid`ele `a ses habitudes autoritaires, Fant^omas d’ailleurs estimait qu’il avait assez renseign'e Ma Pomme et que celui-ci n’avait pas `a pr'etendre approfondir davantage ses intentions.
Fant^omas, en effet, se levait.
— Voil`a, disait-il, Ma Pomme. Voil`a tout ce que j’ai `a te dire en ce moment. Tu comprendras le reste peut-^etre un peu plus tard, et cela, d’ailleurs, importe peu.
Fant^omas riait `a quelque pens'ee secr`ete, puis il interrogeait son complice :