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L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Аллен Марсель

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`A ne jamais conna^itre exactement la ma^itresse de Fant^omas, tous s’'etaient habitu'es `a la diviniser un peu, `a la consid'erer comme une cr'eature extraordinaire.

Et Fant^omas voulait la tuer ?

Ah non, cela ne prenait pas.

— C’est rigolo tout de m^eme, disait Bec-de-Gaz, ce qu’OEil-de-Boeuf a l’imagination puissante ! Voil`a maintenant qu’il jaspine que Fant^omas veut crever sa poule. Non mais des fois ! Ouss’qu’il a 'et'e p^echer ca ?

Et Mort-Subite ajouta :

— Parbleu, si on voulait ^etre renseign'e, faudrait voir `a trouver B'eb'e. Lui la conna^it, lady Beltham. Il pourrait bien nous dire si y sait qu’il y a eu du grabuge dans le m'enage.

B'eb'e, jadis, en effet, avait rencontr'e lady Beltham lorsqu’il l’avait conduite, batelier improvis'e, au Phare de l’Adour [28]. B'eb'e pour cela m^eme, jouissait d’une certaine r'eputation aupr`es de ses compagnons. Mais B'eb'e n’'etait pas l`a.

Et puis, OEil-de-Boeuf insista :

— Eh bien les potes, d'eclarait l’apache, c’est pourtant tout juste exactement comme je vous le dis. C’est le bruit qui court partout. Cet apr`es-midi, on me l’a dit aux Halles, et il para^it que ca se r'ep'etait aussi `a Montrouge. Fant^omas en a assez de la dame, et il lui a proprement 'ecrit qu’il allait la zigouiller.

— Quand ? demanda Bec-de-Gaz.

— Cette nuit ! M^eme que Juve avec tous les flics de la Tour Pointue [29] sont autour de la gironde [30], histoire de lui faire un rempart. Tu parles que si Fant^omas veut descendre sa gerce, ca va le g^ener le moins du monde.

Et OEil-de-Boeuf qui 'etait d'ecid'ement lanc'e, tapait `a tour de bras sur la table :

— Hol`a, p`ere Korn, une tourn'ee g'en'erale ! C’est moi qui raque, et v’l`a les sous. On boit `a la sant'e de Fant^omas qui redevient garcon. Para^it que c’est son go^ut, `a c’t’homme, d’^etre un peu veuf.

Il y eut des grands rires. Puis quelqu’un sursauta :

— Tiens, qui c’est qui vient de refermer la porte ?

Du m^eme geste, tous tourn`erent la t^ete. Un homme inconnu, `a figure de pauvre h`ere, qui paraissait sommeiller `a l’entr'ee du mastroquet, 'etait parti.

Les autres, un instant, demeuraient stup'efaits, inquiets de cette disparition furtive. Le p`ere Korn, lui se pr'ecipitait.

— Ah nom de Dieu ! hurlait le cabaretier. Et il n’a pas raqu'e, ce salaud-l`a !

Mais, arriv'e `a la table o`u l’homme avait pris place, le p`ere Korn s’immobilisa.

— Eh ben, mes cochons, radinez voir…

Les apaches se bouscul`erent. Sur la table il y avait un louis de vingt francs. `A c^ot'e, il y avait, grav'e, `a la pointe du canif sur le vernis du bois, une inscription :

« Fant^omas vous prie tous de vous taire, il n’aime pas les bavards ».

La grande Berthe avait 'epel'e cette phrase d’une voix tremblante.

— C’'etait lui, bon Dieu ! hurla-t-elle.

Et le Bedeau lui-m^eme confirmait la supposition :

— S^ur que c’'etait lui !

Puis OEil-de-Boeuf avait un claquement de langue :

— M’est avis que si Fant^omas est parti, s’il court les rues `a c’t’heure-ci, cette nuit pr'ecis'ement, eh bien, la lady Beltham elle n’a qu’`a se tenir sa peau `a deux mains et `a pr'eparer du fil pour la recoudre au besoin. Le Fant^omas pourrait bien s’^etre barr'e pour aller la crever…

***

Sorti du cabaret du p`ere Korn, Fant^omas avait suivi la rue de la Charbonni`ere et gagn'e les boulevards ext'erieurs en grande h^ate.

Il n’avait pas perdu un mot de ce qu’avaient dit les apaches et, entr'e au cabaret tout souriant, ne paraissant nullement pr'eoccup'e, il en sortit le front soucieux, se mordant les l`evres, l’air hagard.

Fant^omas 'etait-il tout simplement furieux de voir que l’on savait dans la p`egre la myst'erieuse affaire de la menace de mort adress'ee `a lady Beltham ?

'Etait-il, au contraire, boulevers'e en apprenant que tout le monde croyait que c’'etait lui qui menacait sa ma^itresse ?

Fant^omas, ayant march'e jusqu’`a la place Clichy, puis ayant baiss'e le col de son veston, arrang'e savamment sa casquette pour se donner l’air plus pr'esentable, il h'ela un taxi-auto.

L’infernal bandit poss'edait vraiment l’art subtil de se grimer en moins de rien. Il lui suffisait de changer quelques d'etails `a son costume, d’affecter une nouvelle d'emarche, pour devenir m'econnaissable. Dans le cabaret du p`ere Korn, Fant^omas avait eu l’air d’un pauvre bougre, d’un apache. Place Clichy, il apparaissait plut^ot comme un honn^ete ouvrier attard'e.

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