Je suis bien f^ach'e que ton fr`ere Charles ne pourra vous donner que fort peu de temps, mais maintenant qu’il est en Allemagne, il y a plus de chances que par le pass'e de vous voir de temps en temps. Nous sommes toujours encore `a P'etersb<ourg> o`u nous attendons les premiers jours de printemps pour faire le voyage de Moscou. Mais que ceci ne t’effraie pas. Nous n’en sommes pas moins d'ecid'es `a revenir en Allemagne dans le courant de l’'et'e prochain — et une fois r'eunis ce sera, je l’esp`ere, pour ne plus nous quitter de sit^ot.

Continue, ma ch`ere Anna, `a me donner de tes nouvelles. Parle de moi `a tes soeurs et charge-toi de pr'esenter mes respects `a Madame la Directrice et mes amiti'es `a tes oncles.

Adieu, mon enfant. Que Dieu vous prot`ege toutes les trois. T. T.

С.-Петербург

Моя добрая и милая Анна, вот письмо, которое заставило себя ждать, зато оно будет тебе вдвойне приятно, ибо передаст его тебе твой брат Карл. Вам будет несколько трудно узнать друг друга, вы как будто вновь познакомитесь. Мне нечего тебе говорить, моя милая девочка, что я не без некоторой зависти смотрю на его отъезд, который доставит ему случай обнять тебя и твоих сестер. Он берется сообщить тебе все подробности касательно нас, но чего он никогда не сможет достаточно объяснить, это того, как вы мне дороги и как я себя упрекаю в том, что не умею этого как следует выразить в письмах или иначе. Но эта отвратительная лень не мешает мне, будь уверена, беспрестанно вспоминать вас и в особенности быть озабоченным вашей будущностью.

Жаль, что твой брат Карл сможет посвятить вам лишь очень мало времени, но, поскольку он теперь будет в Германии, вам представится более, нежели прежде, случаев видаться время от времени. Мы все еще в Петербурге и ждем первых весенних дней, чтобы совершить путешествие в Москву. Но не пугайся. Мы все-таки твердо намерены вернуться в Германию в течение будущего лета — и, раз соединившись, мы уже, надеюсь, не расстанемся так скоро.

Продолжай, милая Анна, сообщать мне о себе. Говори обо мне твоим сестрам и потрудись передать мое почтение госпоже директрисе, а твоим дядям мои дружеские приветствия.

Прости, дитя мое. Да хранит вас Бог всех трех. Ф. Т.

St-P'etersbourg. Ce 2 mars

Je suis tr`es contrari'e, chers papa et maman, de ne pouvoir vous annoncer rien de positif relativement `a mes affaires, et c’est l`a en partie la raison qui a fait que je me suis si longtemps priv'e du plaisir de vous 'ecrire. On continue toujours `a me donner les plus douces paroles et les assurances les plus satisfaisantes, et je crois en effet qu’on est tr`es dispos'e `a faire quelque chose pour moi. — Mais ce qui les embarrasse, c’est la forme `a donner `a leur bonne volont'e.

La Gr<ande>-Duchesse m’a dit qu’elle 'etait tr`es dispos'ee `a se charger de l’une des petites et qu’elle demanderait `a l’Imp'eratrice de se charger de l’autre, en les placant toutes deux dans le m^eme Institut. — Il est certain que ce n’est qu’`a cette condition que je pourrai mettre `a profit la bienveillante disposition. Car je suis tr`es d'ecid'e `a ne pas s'eparer les deux petites. Quant `a Anna, elle n’est plus d’^age `a recommencer l’Institut, et sa place pour le moment, c’est-`a-dire pour les trois ou quatre ann'ees `a venir ne peut-^etre ailleurs qu’aupr`es de moi.

Nicolas vous aura, malgr'e son <1 нрзб> implacable, donn'e sur nous et sur notre s'ejour `a P'etersb<ourg> plus de d'etails que ne comportent les 'ecritures. — Mes rapports avec la C<om>tesse N<esselrode> sont toujours des plus agr'eables. Je la vois presque tous les jours — et me sens pour elle une v'eritable sympathie qui, je crois, est r'eciproque. C’est chez elle que nous avons dimanche dernier terminer le carnaval. La veille nous avons eu un grand bal chez l’ambassadeur d’Autriche. — C’est tout ce qu’on a pu servir du carnaval, compromis par le deuil qui, du reste, vient d’^etre brusquement termin'e par le fait des couches de la Gr<ande>-Duchesse H'eriti`ere*.

Mais si la soci'et'e de St-P'etersb<ourg> est des plus douces, on ne peut pas en dire au tour du climat, et il n’a pas de jour, o`u je ne sois dans le cas de b'enir deux autres fois la pelisse que vous m’avez donn'ee. C’est l`a un cadeau qui r'eunit dans un tr`es haut degr'e l’utilit'e `a l’agr'ement. — Ce matin encore, le 2/14 mars, nous avons eu 23 degr'es de glace. Quel printemps.

J’ai bien h^ate cependant de voir toutes les rigueurs s’adoucir pour pouvoir songer avec quelque suite `a mes dispositions de voyage pour aller vous trouver*. Il me tarde bien, je vous assure, d’^etre aupr`es de vous, — et ni les lettres que je vous 'ecris de loin en loin, ni les longs intervalles de silence ne sauraient vous donner une id'ee vraie de mon impatience `a cet 'egard.

J’ai eu l’autre jour la visite de Mr Похвиснев, et jusqu’`a pr'esent je ne suis pas parvenu `a d'ecouvrir, o`u il s’est arr^et'e. Parmi les personnes que je vois pas une n’a su me l’indiquer — pas m^eme les Муравьев*. Et d’autre part, je n’ai pas cru de voir faire intervenir la police pour me faciliter cette recherche.

Mille tendres amiti'es `a Doroth'ee et `a son mari. J’ai bon espoir de faire accepter par la Directrice la com'edie qu’il m’a envoy'ee et je lui demande pour prix de mes soins la recette de la premi`ere repr'esentation*.