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Ce dernier r'ep'eta :
— Eh bien ? qu’est-ce qu’il y a donc ?
`A la question pr'ecise, Nichoune 'eclata.
— Il y a, r'epondit-elle, il y a que j’en ai assez de tout ca… Zut ! c’est trop dangereux !…
— Comment, petite, vous ne voulez plus ^etre notre fid`ele bo^ite aux lettres ?
— Non !…
— Mais pourquoi donc ?
— Parce que… parce que je ne veux plus ! voil`a !…
— Voyons, Nichoune, vous avez bien une raison ?
— Si j’ai des raisons ? je n’en manque pas !… Tenez, Vagualame, apr`es tout, j’aime mieux vous dire la v'erit'e… eh bien, voyez-vous, l’espionnage, ca n’est pas mon fort… Il y a juste trois mois que j’en fais… depuis que vous m’avez embauch'ee, et je ne vis plus, j’ai tout le temps la frousse d’^etre pinc'ee… C’est affolant. J’ai d'ej`a rompu avec mon amant… je ne suis plus la ma^itresse de Vinson !… Je ne veux plus ^etre la ma^itresse d’aucun bonhomme compromis dans vos histoires… Alors, vous comprenez, Vagualame, je ne marche plus !… J’aimerais mieux tout raconter `a la justice et me mettre compl`etement en dehors de tout ca.
— 'Ecoutez, ma belle, r'epondit-il, vous ^etes libre, et si vous venez d’h'eriter…
— Je n’ai pas h'erit'e.
— Enfin, reprit Vagualame, si vous vous moquez des jolis louis que je vous apportais chaque mois, c’est votre affaire. J’imagine pourtant que vous ne voudrez pas me mettre dans l’embarras ?…
Nichoune semblait h'esiter.
— Qu’est-ce que vous allez encore me demander ? demanda-t-elle enfin.
— Peu de chose, ma toute belle… tenez, ceci seulement. Je vous le dis : Belfort passe ici demain. Ce papier que je veux lui faire remettre a une tr`es grande importance… soyez gentille, donnez-le-lui… je ne vous ennuierai plus apr`es…
— C’est bon ! disait-elle, donnez votre enveloppe, Vagualame, mais vous savez, c’est la derni`ere fois qu’il faut vous adresser `a moi… Je ne veux plus ^etre la bo^ite aux lettres de Ch^alons… c’est fini !… la derni`ere lev'ee est faite !…
***
Le lendemain de sa myst'erieuse discussion avec Nichoune, vers cinq heures de l’apr`es-midi, Vagualame abordait le patron d’un petit h^otel situ'e tout `a l’extr'emit'e de la ville et fort loin de l’auberge o`u lui-m^eme avait pass'e la nuit.
— Mademoiselle Nichoune n’est pas l`a ? demandait-il.
— Non ! Qu’est-ce que vous lui voulez ?
Vagualame eut un petit rire.
— Des fois, monsieur l’h^otelier, elle ne vous aurait pas pr'evenu qu’un de ses pays devait venir la voir ?
Le patron de l’h^otel, qui se tenait appuy'e contre la muraille nonchalamment, se redressait un peu, presque int'eress'e :
— Si, fit-il, M lleNichoune nous a dit qu’un vieux musicien la demanderait cet apr`es-midi, qu’il faudrait le faire attendre…
— La brave petite fille !
Vagualame jouait `a merveille l’attendrissement :
— Ah ! en voil`a une courageuse et une travailleuse !
L’h^otelier consid'erait toujours le mendiant, assez intrigu'e…
— Vous la connaissez bien ?
— Si je la connais !… parbleu ! mais c’est moi qui lui ai appris `a chanter !… Je suis violoniste, moi, monsieur, je n’ai pas toujours pianot'e sur ce soufflet…
Vagualame montrait son accord'eon et proposait :
— Vous ne voulez pas que je vous en joue une ? C’est-y qu’elle va ^etre longtemps `a rentrer, Nichoune ?
L’h^otelier avait un geste de doute :
— Non, je ne pense pas, elle sera l`a dans un petit quart d’heure… Si vous voulez entrer l’attendre, sa chambre, c’est la pi`ece au bout du corridor, elle est ouverte…
— C’est que je ne sais point, r'epondait Vagualame, si c’est tr`es « comme il faut » d’entrer comme ca dans la chambre d’une jeunesse ?…
L’h^otelier eut un bon rire.
Il trouvait la plaisanterie tr`es fine.
— Comme vous voudrez ! dit-il ; moi je vous offre ca parce qu’elle m’a pr'evenu de votre visite…
Vagualame se d'ecidait :
— Merci, mon bon monsieur, j’vas toujours aller me reposer quelques instants…
Et, clopin-clopant, exag'erant sa d'emarche fatigu'ee, Vagualame gagna la chambre de l’artiste.
Mais il n’en avait pas referm'e la porte derri`ere lui, qu’imm'ediatement son attitude changeait :