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— Mais rassure-toi, fr`ere, ce n’est point nous que les agents pourchassent ce soir, il s’agit du mis'erable Fant^omas, un bandit que nous avons condamn'e `a mort et nous ne serons pas inqui'et'es… Vagualame, d’ailleurs, vient de nous quitter, il va d'etourner les soupcons de la police… il a, nous a-t-il dit, le moyen d’arr^eter les recherches…
Juve 'ecoutait son interlocuteur en se demandant tout bas s’il ne r^evait pas…
Ah ca ! voil`a que Vagualame avait trouv'e moyen de sortir… voil`a qu’on lui annoncait qu’il se faisait fort de d'etourner les recherches des inspecteurs demeur'es au rez-de-chauss'ee…
Juve songea :
— Pourvu que Michel ne le laisse point 'echapper !
Et Juve affirma :
— Vagualame se trompe, fr`ere, il faut que j’aille imm'ediatement lui pr^eter main-forte ou sans cela c’en est fait de nous tous. Je ne connais que la porte secr`ete. guide-moi vers l’autre sortie, que je n’attire pas l’attention des agents…
Le Russe s’inclina :
— Il sera fait selon tes d'esirs, fr`ere. Suis-moi, mais sois prudent…
Juve marchant sur les talons du conspirateur fut men'e, apr`es bien des d'etours, `a un escalier tr`es ordinaire.
— Tu n’as plus qu’`a monter, fr`ere Trokoff, ces marches m`enent tout juste `a la boutique… si les agents te demandent d’o`u tu viens, tu n’auras qu’`a dire que tu remontes de la premi`ere cave o`u tu 'etais en train de chercher un volume… aussi bien peu importe qu’ils visitent les caves… ils ne trouveront pas la porte dissimul'ee…
Juve s’inclina :
— Merci, fr`ere… sois en paix…
Le Russe 'etait `a peine revenu dans la salle secr`ete, que Juve, perdant subitement calme et gravit'e, se rua dans l’escalier pour regagner la boutique et arr^eter Vagualame et Bobinette…
***
L’agent Michel, sur les instructions pr'ecises de Juve n’avait pas quitt'e la porte de la librairie.
Il 'etait l`a depuis une demi-heure environ et commencait `a s’inqui'eter du moment o`u il serait relev'e de sa garde lorsque Juve, bl^eme, d'efait, des gouttes de sueur perlant au front, bondit vers lui et le saisissant aux 'epaules, le secouant brusquement, demanda :
— Vous les avez laiss'es sortir, Michel ?
L’agent se d'egageait de l’'etreinte de Juve :
— Personne n’est sorti, chef, je vous en donne ma parole… personne n’est sorti, ni avant vous, ni apr`es vous…
— Ils ne sont plus `a l’int'erieur du magasin…
Tr`es calme, l’agent Michel eut un geste d’incompr'ehension :
— Ca, je ne sais pas, dit-il : je ne peux vous affirmer qu’une chose, chef, c’est que vous et votre prisonni`ere, vous ^etes les seuls que j’aie laiss'e passer…
— Moi et ma prisonni`ere ?…
De quelle prisonni`ere lui parlait Michel ?
— Mais sans doute, reprit Michel… voyons chef, je ne r^eve pas ? vous ^etes venu il y a dix minutes, ici, vous m’avez dit : « Ne bougez pas, Michel ! laissez-moi passer ! je suis Juve… j’emm`ene cette femme au poste et je reviens… »
Juve en entendant ces mots baissa la t^ete, accabl'e.
— J’'etais grim'e, n’est-ce pas ? demanda-t-il enfin.
— Oui ! vous aviez pris votre costume de Vagualame…
— C’'etait le vrai Vagualame ! hurla-t-il ! ce n’'etait pas moi d'eguis'e en Vagualame… comme vous l’avez cru, Michel, c’'etait Vagualame en personne ! Je vous dis que c’est Vagualame lui-m^eme que vous avez laiss'e 'echapper.
— Alors, chef ?
— Alors, mon pauvre Michel, que voulez-vous que je vous dise ? Vous n’y ^etes pour rien.
Juve qui se rendait compte du chagrin de son subordonn'e, l’ayant pris famili`erement sous le bras, calmait Michel, cependant que tous deux, m'elancoliques, marchaient le long de la rue Monge, `a la t^ete de la petite colonne d’agents de la S^uret'e qui, t^ete basse, ne comprenait pas exactement ce qui s’'etait pass'e, sinon que Juve avait fait buisson creux.
Juve, toutefois, gardait un faible espoir :
— `A propos, Michel, dites-moi, vous n’avez surpris aucune conversation suspecte ? Cette M meSophie n’a rien dit d’int'eressant ?…
L’agent Michel secoua la t^ete :
— Rien du tout, chef !…
— Vos agents ne se doutent de rien ? Ils ne savent pas qui nous poursuivons ?
— Oh ! figurez-vous, monsieur l’inspecteur, dit Michel, qu’ils sont `a cent lieues de supposer qu’ils marchaient ce soir sur les traces de Fant^omas !… Cet apr`es-midi, il y a eu une plainte d'epos'ee `a la S^uret'e `a propos du vol d’un ours commis `a la foire du Tr^one… ils sont persuad'es que c’est `a ca qu’ils doivent la perquisition de cette nuit… et cela d’autant plus que justement l’un de mes hommes qui habite Sceaux, quelques minutes avant le d'ebut de notre exp'edition, racontait que son fr`ere, voiturier l`a-bas, a 'et'e charg'e d’aller dans cinq jours, avec deux chevaux, prendre `a cinq heures du matin, sur la route de Robinson, une roulotte qu’il doit conduire `a vingt kilom`etres de l`a… Ce rendez-vous lui a paru bizarre…