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Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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Аллен Марсель

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Tr`es froid, mais dissimulant sa nervosit'e d’homme press'e, M. de Parcelac, sans lui d'esigner un si`ege, l’interrogea :

— Qu’y a-t-il pour votre service, monsieur ?

Le visiteur qu’on n’avait point invit'e `a s’asseoir, prit une chaise et s’y installa :

— Monsieur, j’ai eu l’honneur de vous faire passer ma carte, je m’appelle M. Dominet, ce nom ne vous dit rien, sans doute ?

— En effet, monsieur.

— Au Palais, dans le monde de la Basoche [13], mon nom est plus populaire. Je suis, en effet, le secr'etaire de la Chambre des notaires de Paris, et c’est en cette qualit'e que je viens vous rendre visite.

— Que puis-je pour vous ?

— Voici, fit M. Dominet, vous savez certainement que la Chambre des notaires s’int'eresse `a nombre de bonnes oeuvres, et que notamment elle a pris sous son patronage la loterie destin'ee `a venir remplir la caisse de la Soci'et'e de secours des orphelins d’officiers minist'eriels. Je suis moi-m^eme tout particuli`erement charg'e des int'er^ets de cette oeuvre admirable, qui, d’ailleurs, comme toutes ses consoeurs, a perp'etuellement besoin de recourir `a la charit'e publique.

« Bon, pensa M. de Parcelac, je me suis fait roul'e, c’est un tapeur. »

Et, r'esign'e, pour en finir, il mit la main au gousset. Son interlocuteur vit le geste et lui fit signe d’arr^eter :

— Non, monsieur, d'eclara-t-il avec un sourire, je ne viens pas solliciter votre g'en'erosit'e aujourd’hui, mais simplement vous rappeler que le tirage de notre loterie a lieu ce soir m^eme et, comme c’est le Comptoir national qui veut bien se charger de nous fournir les instruments de tirage, je venais vous rendre visite par d'ef'erence d’abord, et ensuite, pour m’assurer que toutes les dispositions 'etaient bien prises.

« Au diable l’importun », pensa M. de Parcelac qui, cependant, ne montrait rien de son ennui :

— Je suis, en effet, parfaitement au courant, monsieur, mais je ne m’occupe pas personnellement de ces d'etails.

Le directeur du Comptoir national appuyait sur un timbre, un huissier se pr'esenta :

— Veuillez conduire monsieur au directeur du personnel des services ext'erieurs.

M. de Parcelac se leva, obligeant de la sorte son interlocuteur `a faire de m^eme :

— Monsieur Dominet, lui d'eclara-t-il, je vous suis bien reconnaissant de l’aimable visite que vous ^etes venu me faire. Veuillez transmettre `a M. le pr'esident de la Chambre des notaires l’expression de mes sentiments les meilleurs.

Les deux hommes se congratul`erent quelques secondes, chaleureusement, puis, M. de Parcelac ajouta :

— La personne `a qui je vous adresse va vous fournir toutes les explications qu’il vous conviendra de recueillir.

Le directeur poussa l’importun vers la porte :

— Au revoir, monsieur Dominet.

— Au revoir, monsieur le directeur.

Cependant que M. de Parcelac revenait avec pr'ecipitation `a son bureau ministre et que, tout en appuyant sur des timbres divers, il d'ecrochait son r'ecepteur t'el'ephonique pour demander une communication, M. Dominet, toujours obs'equieux et poli, s’effacant chaque fois qu’il rencontrait quelqu’un dans les couloirs de la banque, suivait l’huissier qui le conduisait au bureau des Services ext'erieurs. Il se trouva l`a en pr'esence d’un brave homme d’employ'e, que l’attitude distingu'ee de M. Dominet, et particuli`erement son monocle noir, impressionn`erent au plus haut point.

— C’est bien de l’honneur pour moi, monsieur le secr'etaire de la Chambre des notaires, d'eclarait-il, en faisant force courbettes devant M. Dominet, de recevoir votre visite. Je vais vous montrer, puisque cela vous int'eresse, comment nous proc'edons pour le tirage de ces loteries.

M. Dominet daigna sourire :

— Je suis, en effet, fort intrigu'e, d'eclara-t-il, fort anxieux de savoir comment cela se passe.

Les deux hommes pass`erent dans une salle voisine du bureau, o`u se trouvaient des sacs de diverses dimensions, une grande table et des cylindres mont'es sur un b^ati en m'etal.

— Qu’est-ce que c’est que cela ? demanda M. Dominet.

Son interlocuteur eut l’air 'etonn'e :

— Voyons, fit-il ; mais mon cher monsieur Dominet, ce sont les roues pour tirer les loteries. Vous ne les reconnaissez donc pas ? Voil`a pourtant trois semaines que nous en avons fait livrer une `a votre administration. Vous savez bien. La loterie devait se tirer le mois dernier, et puis, comme toujours, on a d^u reculer la date de l’op'eration, tous les billets n’'etant pas plac'es. Enfin, c’est toujours pour aujourd’hui, n’est-ce pas ?

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