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— Apr`es ? Qu’arrive-t-il ?
— Apr`es, monsieur Havard ? Il arrive que le prince Nikita, averti par Juve, se rend en Bretagne pour aller chercher dans la cachette le fameux portefeuille rouge.
— Mais il n’y est plus ? Qui le poss`ede, alors d’apr`es vous ?
— H'e, monsieur Havard, Juve, dans un rapport, vous en a inform'e. C’est tr`es probablement la fille de Fant^omas. C’est elle qui est venue, pendant que Juve s’en allait, reprendre le portefeuille qu’elle lui a vu cacher, et cela est si vrai que, rappelez-vous-en, Juve, persuad'e que la jeune fille l’a dissimul'e dans la roulotte du p`ere et de la m`ere Zizi s’en va perquisitionner dans cette roulotte. Vous vous rappelez, monsieur Havard, comment cette perquisition s’est termin'ee ?
— Naturellement, par la d'egringolade de la roulotte, d'egringolade provoqu'ee par Fant^omas, affirme Juve. Et alors ?
— Alors, monsieur Havard, alors c’est tout.
M. Havard haussa les 'epaules. Une seconde, il sembla m^achonner entre ses dents quelque apostrophe virulente adress'ee au chef du Service des Recherches, mais il se contint.
— Alors, d'eclara-t-il, ce n’est pas tout, monsieur Lerey. C’est m^eme `a ce moment, au contraire, que ces affaires deviennent tragiques. Voyons, vous ^etes au courant des 'ev'enements de ce matin ?
— Vous visez, monsieur Havard, la communication de l’ambassade russe ?
— Oui, la communication de l’ambassade, qui m’est arriv'ee `a cinq heures du soir et qui m’apprenait que, par le fait d’un myst'erieux hasard, le prince Nikita a failli tuer Ellis Marshall en faisant assaut avec lui `a la salle d’armes. Ce qui est au moins 'etrange, vous en conviendrez, si vous voulez bien penser qu’une heure `a peine apr`es l’arriv'ee de la lettre de l’ambassade, j’apprends que les domestiques d’Ellis Marshall ont retrouv'e leur ma^itre mort assassin'e, la gorge ouverte d’un coup de rasoir en son domicile. De vous `a moi, qu’est-ce que cela vous donne `a penser ? Le prince Nikita, d’une part, `a onze heures du matin, `a la salle d’armes, manquant de tuer Ellis Marshall, un agent qui doit le g^ener, manquant de le tuer, vous m’entendez, ratant son coup et puis, deux heures apr`es, ce m^eme Ellis Marshall d'ecouvert chez lui, mort assassin'e.
— Ce qui me donne `a penser ? Hum…
Et, se d'ecidant enfin `a riposter :
— Cela ne me donne rien `a penser, monsieur Havard.
— Vraiment ? Eh bien, moi, savez-vous ce que j’ai fait en apprenant cet assassinat ?
— Ma foi non, monsieur Havard ?
— Eh bien, je n’ai pas h'esit'e. J’ai fait appeler Juve, et je lui ai dit : « Juve, allez d’urgence chez Ellis Marshall et assurez-vous que c’est bien, comme je le crois, le prince Nikita qui a assassin'e ce bonhomme. Si vous en obtenez la preuve imm'ediatement, nous 'etouffons l’affaire. »
— Et Juve vous a dit, monsieur ?
— Eh bien, il ne m’a rien dit, pour la bonne raison qu’il n’est pas encore revenu. Le prince Nikita a eu son 'etrange accident `a onze heures du matin, `a la salle d’armes. J’ai recu `a trois heures la lettre de l’ambassade me le signalant. `A trois heures et demie on me t'el'ephonait la mort d’Ellis Marshall, et Juve partait imm'ediatement. Depuis, plus aucune nouvelle. Je ne sais m^eme pas ce qu’est devenu Juve.
Or, M. Havard n’avait pas fini sa phrase, que la porte de son cabinet s’ouvrit.
Juve 'etait radieux.
— Quand on parle du loup, monsieur Havard, commenca-t-il.
Mais M. Havard n’'etait pas d'ecid'ement en 'etat de plaisanter. Il coupa brusquement la parole `a Juve pour lui demander :
— Eh bien ? Quel est l’assassin ? Est-ce le prince Nikita qui a tu'e Ellis Marshall ? Pourquoi ce meurtre ?
Juve, sans se presser, avec un calme merveilleux qui contrastait avec l’'enervement de M. Havard, se d'ebarrassa de son chapeau, plia le journal qu’il tenait `a la main, puis enfin se laissa tomber dans un grand fauteuil plac'e face au bureau de M. Havard.
— Chef, dit tranquillement Juve, vous n’y ^etes pas.
— Allons donc.
— Mais d’abord, voici qui va singuli`erement 'eclairer votre religion. Monsieur Havard, savez-vous pourquoi Ellis Marshall a 'et'e tu'e ?
— Non. Dites.
— Parce qu’il poss'edait le portefeuille rouge.
— Ellis Marshall avait le portefeuille rouge ? Vous ^etes certain de ce que vous avancez ?
Juve haussa l'eg`erement les 'epaules, parut h'esiter avant de se d'ecider `a r'epondre :
— Ma foi, certain, monsieur Havard, c’est un gros mot. Je ne suis pas certain qu’Ellis Marshall avait « le » portefeuille rouge, mais je suis s^ur qu’il poss'edait « un » portefeuille rouge.
— Allons, expliquez-vous.
Mais Juve avait pour habitude de ne pas se d'emonter, de ne jamais s’'emouvoir. Tout naturellement, d’ailleurs, il poursuivait, d’autant plus calme que son interlocuteur 'etait plus agit'e :
— Voil`a, je m’explique, monsieur Havard.
Et Juve, sans se presser, tranquillement, informa le chef de la S^uret'e que s’il avait 'et'e fort long `a mener son enqu^ete, la cause en 'etait aux multiples d'emarches qu’il avait cru devoir effectuer.
— Je me suis rendu `a la salle d’armes. Il m’a sembl'e int'eressant de savoir, en effet, dans quelles circonstances le prince Nikita avait failli tuer Ellis Marshall.