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— Que faites-vous l`a ? r'ep'etait le ma^itre, j’avais ordonn'e `a tout le monde de descendre en cours de route. Vous avez eu peur ? disait le G'enie du Crime, vous n’avez pas os'e quitter la voiture en plein Paris ? Imb'eciles !
Il serrait dans la main la crosse d’un browning et semblait si furieux que Bouzille jugea prudent de s’'eloigner sans bruit et de se cacher derri`ere un gros tas de bois. Fant^omas, d’ailleurs, avait maintes fois prouv'e qu’il ne tol'erait que personne, f^ut-ce le meilleur de ses lieutenants, se perm^it de d'esob'eir `a ses ordres.
— Ma^itre, commenca l’un des apaches, prot`ege-nous. Avec toi, on ne craint rien, emm`ene-nous.
Mais il n’acheva pas.
Alors qu’assez piteux, ils consid'eraient leur redoutable chef, deux ombres apparurent.
Alors Fant^omas 'eclata d’une col`ere nouvelle :
— Toi, T^ete-de-Lard et toi, la Carafe ? Pourquoi ^etes-vous ici ?
— Nous sommes poursuivis, expliqua la Carafe.
— Vous ^etes poursuivis ? Et vous venez ici ?
— On est venu o`u on a pu.
— On vous file donc ?
— Oui.
— Qui ?
— La S^uret'e.
— Alors, nous sommes perdus, dit Fant^omas tr`es froid, nous sommes perdus et perdus gr^ace `a vous.
— 'Ecoute, patron, commenca T^ete-de-Lard en tremblant, on a cru bien faire en rappliquant ici, rapport `a ce qu’on pouvait te pr'evenir.
— Me pr'evenir de quoi ? Il fallait aller n’importe o`u, mais ailleurs. Puisque vous vous sentiez fil'es, ce n’'etait pas la peine de guider les agents jusqu’ici. Que faire maintenant ?
Pendant quelques secondes, en effet, Fant^omas parut vivement pr'eoccup'e. Lui qui tant de fois avait, avec un merveilleux sang-froid, trouv'e moyen d’'echapper aux sourici`eres les mieux combin'ees, aux pi`eges les plus habiles, semblait, par exception, ne point savoir comment se tirer du pas difficile o`u la maladresse de T^ete-de-Lard et de la Carafe venait de le faire tomber.
Parbleu, c’'etait 'evident, ces ombres qui se rapprochaient, qui entraient dans le terrain vague, qui se glissaient derri`ere les tas de charbon, se faufilaient sous les voitures, c’'etaient, ce ne pouvaient ^etre que des agents. Et, d`es lors, comment esp'erer leur 'echapper, comment passer inapercus ?
Fant^omas grincait des dents. Le browning qu’il tenait toujours `a la main brillait de facon sinistre dans l’obscurit'e de la nuit commencante.
— Chiens que vous ^etes ! hurla le bandit, vous m'eriteriez, ma parole, que je vous punisse en usant sur vous mes derni`eres cartouches.
Puis, soudain, comme les agents se rapprochaient, Fant^omas haussa les 'epaules :
— Je vais vous sauver pourtant, dit-il, vous sauver du moins si vous avez assez de courage pour risquer le tout pour le tout.
Le Ma^itre de l’Effroi entra^ina ses compagnons auxquels s’'etait joint Bouzille, fort ennuy'e de la tournure prise par les 'ev'enements, `a l’autre extr'emit'e du hangar. Il y avait l`a un haquet charg'e de tonneaux vides et `a quelque distance, dans son box, un cheval minable.
— Hardi, ordonna Fant^omas, attelez cette b^ete `a la voiture. Vous vous caserez dans les tonneaux.
— Mais qui conduira ?
— Moi.
Et, tandis que les apaches, ne comprenant pas encore ce qu’il m'editait, mais 'epouvant'es `a la pens'ee de la police, lui ob'eissaient aveugl'ement, Fant^omas, avec une agilit'e folle, grimpait le long d’une 'echelle, saisissait une valise dissimul'ee `a l’entrecroisement de deux poutres.
— Vite !
Apr`es avoir entour'e le terrain vague, apr`es avoir p'en'etr'e derri`ere le mur de cl^oture, les agents de la S^uret'e embusqu'es derri`ere le moindre obstacle, allaient `a coup s^ur se pr'ecipiter dans le hangar.
La porte de l’'ecurie 'etait d'efonc'ee, le cheval d'ej`a entre les brancards. Fant^omas, pourtant ne s’occupait pas du haquet. Il avait ouvert la valise, en tirait des habits d’ouvriers, un pantalon de velours une veste d’alpaga, une casquette haute, sur la visi`ere de laquelle une plaque en cuivre 'etait fix'ee, portant ces mots : Charbonnage d’Audincourt.
En une seconde alors, s’aidant d’une petite glace qu’il avait trouv'ee dans la valise, Fant^omas acheva de se maquiller. Du rouge habilement dispos'e lui fit un nez d’ivrogne. Il enfila une perruque grisonnante. Une barbe que collait du blanc gras et du vernis changeait l’aspect de sa physionomie, au point qu’il en devenait m'econnaissable :
— ^Etes-vous pr^ets ?
— Le haquet est attel'e, patron.
— Alors sautez dans les tonneaux.
Y compris Bouzille, on se pr'ecipita `a l’int'erieur des barils charg'es sur la longue voiture.
— Heureusement j’ai pens'e `a tout, murmurait Fant^omas. Ce matin j’ai d'ecouvert ce haquet et j’ai song'e `a emporter cette valise de maquillage.
Car c’'etait l`a, en v'erit'e, l’une des caract'eristiques de ce g'enial et fantastique assassin. Fant^omas le disait lui-m^eme : il avait pens'e `a tout.