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— Je crois bien, je ne connais que ca. Autre chose. Voulez-vous me permettre d’'emettre une opinion ?
— Parlez.
— Tout d’abord, est-ce que vous poss'edez le signalement de J'er^ome Fandor ?
— Bien s^ur, r'epondit Nalorgne, c’est un garcon ni grand ni petit, tenez, `a peu pr`es votre taille. Mais les cheveux aussi blonds et le teint aussi clair que votre peau est basan'ee et vos cheveux noirs.
— Bien, Vous seriez donc capables de le reconna^itre dans une foule ?
— Mais naturellement.
— Dans ces conditions, je vais vous dire ce qu’il faut faire. Parfaitement inutile que vous alliez rue de la Marine, au domicile de ce journaliste. Il se sait traqu'e, ca je vous jure qu’il le sait, ne repara^itra pas chez lui. Il va faire tout son possible pour quitter Cherbourg, voyons. Or, il y a trois moyens de s’en aller de Cherbourg.
— Lesquels ?
— Primo, s’embarquer `a bord d’un des navires qui font escale `a Cherbourg. (Fandor n’emploiera pas ce proc'ed'e de fuite car il sait par exp'erience que l’on est toujours pinc'e, lorsqu’on s’'evade de cette facon). Rappelez-vous seulement que Fant^omas lui-m^eme, Fant^omas fut pris `a bord d’un transatlantique entre Liverpool et le Canada.
— C’est exact.
— Reste deux autres moyens. Secundo, partir par le train. Je vous conseille vivement d’aller l’un et l’autre vous poster `a la gare et d’y exercer une surveillance active. M'efiez-vous des gens `a grande barbe, des voyageurs porteurs de lunettes bleues. Ces physionomies-l`a doivent toujours ^etre suspectes aux policiers subtils, car elles cachent un d'eguisement le plus souvent.
— Mais vous avez absolument raison, s’'ecria P'erouzin enthousiasm'e.
— Et le troisi`eme moyen ? demanda l’autre.
— Le troisi`eme, partir `a pied dans la campagne, fournir des r'eponses trop nombreuses pour qu’on puisse suivre la piste. Donc, il faut s’occuper du deux.
— Ne perdons pas une minute. Allez `a la gare et restez-y jusqu’`a ce que je vous rejoigne. Moi, je m’en vais pendant ce temps-l`a dans les rues, interroger les passants, questionner les agents de police, confesser les cochers de fiacre. Et ce soir, `a nous les petites dames.
Deux minutes plus tard, le faux policier, en effet, se retrouvait bien dans la rue. Le journaliste consultait sa montre :
— Quatre heures moins dix, et le facteur qui doit venir `a quatre heures, je n’ai que le temps.
Fandor approchait du num'ero cent cinquante de la rue de la Marine, lorsqu’il s’arr^eta soudain :
— Bougre de bougre, j’allais faire une jolie gaffe, rentrer chez moi, m'econnaissable comme je suis, mais la logeuse ne me recevrait pas.
Fandor n’h'esita pas. Il entra chez le pharmacien :
— Monsieur, lui dit-il, j’ai une terrible rage de dents et des migraines 'epouvantables.
— Il faut, d'eclara l’apothicaire, vous prot'eger la figure contre le vent et le froid.
— Voulez-vous me donner de l’ouate, des bandes de toile fine ?
Le pharmacien d'ef'era au d'esir du client.
Ne laissant passer que les yeux, Fandor paya rapidement et disparut de la boutique, laissant le pharmacien tout ahuri par la f'ebrile activit'e de ce client. Puis, hardiment, il se pr'esenta au bureau de l’h^otel modeste o`u il avait lou'e une chambre meubl'ee. En pr'esence de la logeuse il poussa des soupirs `a fendre l’^ame :
— Que je souffre ! que je souffre, vite, donnez-moi ma clef, madame, le vingt-cinq, que je monte me coucher.
— C’est-y possible, mon Dieu, d’avoir des douleurs pareilles voulez-vous que je vous pr'epare quelque chose, mon bon monsieur ?
— Non, non, merci, madame, avec du repos, ca ira mieux. Au fait, disait-il, je n’y suis pour personne, si l’on venait me demander, sauf toutefois pour le facteur qui doit m’apporter une lettre.
La recommandation faite, Fandor gagna la chambre qu’il occupait au premier 'etage, se d'ebarrassa de son pansement, puis, s’asseyant sur une chaise, il attendit.
Un bon quart d’heure passa. Soudain, un coup discret retentit `a la porte.
Le journaliste ouvrit :
— Donnez-vous donc la peine d’entrer.
— Monsieur J'er^ome Fandor, n’est-ce pas ? interrogea l’employ'e des postes, qui ayant tir'e de son grand sac une lettre ainsi qu’un livre `a signer, tendait les deux objets `a Fandor.
Le journaliste trempait sa plume dans l’encre.
« C’est amusant pensa-t-il, de signer de mon nom sur ce livre, alors que la police enti`ere semble ^etre `a mes trousses. On ne dira pas que je cherche `a me cacher ».