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— Hein !… vous dites ?…
Le commissaire de police, en 'ecoutant cette extraordinaire d'eclaration, avait naturellement sursaut'e. M. Jussieu, tout au contraire, demeurait impassible. Le courtier en parfumerie continua :
— Je vois, monsieur le commissaire de police, que mes d'eclarations vous surprennent. Elles sont cependant nettes et claires, et j’ajoute qu’elles sont conformes `a la v'erit'e. Je n’ai pas encore 'et'e vol'e, mais je vais l’^etre. C’est pourquoi je m’adresse `a vous.
Or, M. Jussieu e^ut parl'e chinois, arabe ou japonais, que le magistrat, peut-^etre, n’e^ut pas moins bien compris ses affirmations.
— Expliquez-vous ? demanda-t-il.
— Je ne fais que cela, r'epliqua le courtier. Les explications que j’ai `a vous fournir sont d’ailleurs tr`es br`eves. Elles se r'esument en ceci : quelqu’un, monsieur le commissaire de police, quelqu’un que je ne connais pas, mais dont je connais le nom, h'elas, au m^eme titre que tout un chacun, quelqu’un qui n’est autre que Fant^omas, pour tout dire, va me voler et…
Le commissaire de police interrompit encore :
— Fant^omas va vous voler… r'ep'etait-il d’un ton d’incr'edulit'e profonde. Ah ! ca, que me chantez-vous l`a ?
M. Jussieu `a ce moment ne cacha point qu’il 'eprouvait quelque impatience de ces continuelles interruptions.
— Je ne chante rien, fit-il assez s`echement. Je m’adresse `a un magistrat, et je parle s'erieusement !
Ce petit avertissement donn'e, le courtier en parfumerie continuait en effet :
— Fant^omas a d^u savoir tr`es 'evidemment que je me rendais `a Bruxelles pour toucher des fonds. Il l’a su, puisqu’il me l’a 'ecrit, et il se propose de me voler.
M. Jussieu, une fois encore, dut 'ecouter une observation du commissaire de police.
— Fant^omas vous a 'ecrit ?… protestait le magistrat. Vous vous moquez de moi ?…
— Monsieur le commissaire, je ne me le permettrais pas, d’ailleurs voici la lettre…
Le courtier en parfumerie avait sorti de sa poche une enveloppe dont il tirait une lettre qu’il offrait au commissaire. Celui-ci, 'ebahi, lut `a haute voix :
Monsieur,
J’ai appris que vous alliez toucher une somme de quarante mille francs. J’ai moi-m^eme besoin d’argent, je vous propose donc une entente : versez-moi vingt mille francs imm'ediatement ou je vous tue et vole la totalit'e des fonds. Si nous sommes d’accord, laissez de la lumi`ere dans votre chambre toute cette nuit, je m’arrangerai pour vous faire savoir o`u et quand je vous ferai pr'esenter ma quittance.
Croyez-moi tout `a vos ordres,
Fant^omas
— C’est inimaginable ! b'egayait le commissaire de police.
M. Jussieu r'ep'eta :
— C’est inimaginable, mais c’est r'eel.
`A ce moment, le commissaire de police toisa son visiteur avec une certaine admiration.
— Et alors, demanda-t-il, qu’avez-vous fait ? Vous n’avez pas eu trop peur ?
Mais `a cette question, M. Jussieu se contentait de r'epondre par un discret haussement d’'epaules :
— Je ne suis pas homme `a m’effrayer facilement, murmurait-il. Et d’ailleurs, le danger n’'etait pas imm'ediat. Je n’ai naturellement pas allum'e ma lampe, mais, ainsi que vous le voyez, d`es ce matin, j’ai pris les fonds dont je disposais et je suis venu vous demander aide et protection.
M. Jussieu parlait d’un ton calme, et pensait bien `a ce moment ne rien dire d’extraordinaire. Or, le commissaire de police, en apprenant ses intentions, sursautait plus fort encore.
— Hein ! demandait-il, vous ^etes venu me demander aide et protection ? Mais, sapristi, vous ne savez pas ce que vous dites, alors ? Croyez-vous donc que je sois charg'e de prot'eger tout le monde, moi ?…
`A cette virulente apostrophe, ce fut au tour du courtier en parfumerie d’^etre plut^ot 'etonn'e.
— Dame, riposta-t-il tranquillement. Je croyais que vos fonctions…
Mais le commissaire de police se faisait net et cat'egorique :
— Mes fonctions sont bien d'efinies, dit-il, et je n’entends pas me m^eler de ce qui ne me regarde pas. Mon r^ole, monsieur, est de m’occuper des crimes et des d'elits ; quand vous aurez 'et'e vol'e, venez me trouver, et je vous 'ecouterai. Jusque-l`a, je ne peux rien pour vous !